Aux « Oscars de la science », le Franco-Canadien Michel Sadelain primé pour ses travaux sur le cancer

Michel Sadelain a été récompensé lors des Breakthrough Prizes, à Los Angeles, les « Oscars de la science ».
ETIENNE LAURENT / AFP Michel Sadelain a été récompensé lors des Breakthrough Prizes, à Los Angeles, les « Oscars de la science ».

SCIENCE - Strass, paillettes et avancées décisives. Au cours d’une soirée glamour à laquelle participaient de nombreuses célébrités, le chercheur franco-canadien Michel Sadelain s’est vu décerner un « Oscar de la science » à Los Angeles, ce samedi 13 avril, récompensant ses travaux sur le cancer.

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Cet ingénieur généticien a ainsi reçu le Breakthrough Prize, lors de cette soirée réunissant de grands noms de la tech comme Elon Musk ou Bill Gates, et une avalanche de célébrités, parmi lesquelles Jessica Chastain, Robert Downey Jr et Bradley Cooper, pour ses recherches ayant permis de programmer des cellules du système immunitaire à combattre le cancer.

« Mes collègues m’ont longtemps dit que ça ne marcherait jamais »

« Ce prix, c’est une reconnaissance extraordinaire », a confié à l’AFP Michel Sadelain, sur le tapis rouge du musée des Oscars. « C’est d’autant plus un honneur que (...) mes collègues scientifiques m’ont longtemps dit que ça ne marcherait jamais », a-t-il expliqué à propos de sa thérapie appelée CAR-T, très efficace contre certains cancers du sang.

Le Breakthrough Prize a été lancé par des entrepreneurs de la Silicon Valley au début des années 2010 pour récompenser des percées en recherche fondamentale. Il se revendique comme une sorte d’« Oscars de la science » et est aujourd’hui mieux doté que le prix Nobel. Michel Sadelain va ainsi se partager 3 millions de dollars avec l’Américain Carl June, un immunologiste qui a travaillé sur le même sujet que lui.

Michel Sadelain et Carl June vont se partager trois millions de dollars après avoir été récompensés, bien plus que pour un lauréat de prix Nobel.
JON KOPALOFF / Getty Images via AFP Michel Sadelain et Carl June vont se partager trois millions de dollars après avoir été récompensés, bien plus que pour un lauréat de prix Nobel.

« Le plus grand plaisir néanmoins, c’est de voir des patients (...) qui n’avaient plus aucune chance et qui nous remercient, qui sont vivants aujourd’hui grâce aux cellules CAR-T », a expliqué le scientifique, qui a d’abord étudié en France et au Canada avant de s’installer au Memorial Sloan Kettering Cancer Center de New York.

De la « science-fiction » au réel

Concrètement, les recherches de Michel Sadelain ont permis de reprogrammer génétiquement les lymphocytes T, qui sont les petits soldats du système immunitaire. Ces derniers acquièrent alors des récepteurs capables de reconnaître et combattre les cellules cancéreuses, que le corps laisse en temps normal proliférer car il ne se rend pas compte de leur nocivité. Ces récepteurs, qu’il nomme récepteurs d’antigènes chimériques (CAR en anglais), ordonnent également aux lymphocytes T de se multiplier pour avoir plus de combattants contre la maladie.

Cette manière de traiter le cancer relevait au départ « de la science-fiction », s’amuse désormais Michel Sadelain. Mais aujourd’hui, le chercheur se réjouit de voir que toute une industrie s’est développée pour produire ces « médicaments vivants ».

Grâce à ses travaux et ceux de Carl June, une demi-douzaine de thérapies utilisant cette méthode sont approuvées aux États-Unis, et des centaines d’autres essais cliniques sont en cours. Les lymphocytes T du patient sont d’abord collectés, modifiés à l’extérieur du corps, puis réinjectés dans le sang.

Généraliser ce traitement

Le traitement a prouvé son efficacité contre les lymphomes, certaines leucémies, ou encore contre le myélome, un cancer sanguin grave et complexe. Mais Michel Sadelain espère que la recherche pourra permettre d’« appliquer ce traitement à d’autres cancers ».

« Les cellules CAR-T pourraient peut-être marcher contre les maladies auto-immunes, des maladies comme le lupus, et peut-être un jour des maladies comme le diabète et les scléroses en plaques », explique-t-il.

L’un des principaux défis reste aussi de réduire les coûts du traitement, qui coûte aujourd’hui plus de 500 000 dollars - une somme en général couverte par les assurances.

Ce samedi, une vingtaine d’autres scientifiques ont été récompensés lors du Breakthrough Prize, dans différentes catégories. Les recherches honorées comprenaient notamment des médicaments efficaces pour traiter la cause sous-jacente de la mucoviscidose, une maladie mortelle des poumons, et la découverte des causes génétiques les plus courantes de la maladie de Parkinson.

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