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Orban: "Nous rejetons toujours la relocalisation des demandeurs d'asile"

ORBAN: "NOUS REJETONS TOUJOURS LA RELOCALISATION DES DEMANDEURS D'ASILE"

par Gabriela Baczynska et John Chalmers

BRUXELLES (Reuters) - Le Premier ministre hongrois Viktor Orban rejette le pacte migratoire présenté mercredi par la Commission européenne, car il obligerait la Hongrie à accueillir des demandeurs d'asile, même s'il y voit certains aspects positifs.

Le projet de réforme de la politique migratoire de l'instance exécutive de l'Union européenne propose d'introduire parmi les Vingt-Sept un "mécanisme de solidarité obligatoire" et de renoncer à la règle contestée voulant que le pays de première arrivée soit chargé de gérer les demandes d'asile, un système qui a exercé une contrainte maximale sur l'Italie, la Grèce ou Malte et l'Espagne, en première ligne sur les routes migratoires via la Méditerranée.

Dès le lendemain de sa présentation, la Hongrie et les autres pays du groupe de Visegrad - Pologne, République tchèque, Slovaquie - ont fait savoir qu'ils continueraient à refuser de recevoir des demandeurs d'asile sur leur territoire pour soulager d'autres pays membres.

Pour Viktor Orban, qui a accordé une interview à Reuters vendredi, lendemain d'une rencontre avec la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, le diable est niché dans les détails de la proposition.

"Il y a quelques bonnes nouvelles et il y a des problèmes qui n'ont toujours pas été résolus", estime le Premier ministre hongrois.

"Certains tabous ont disparu", relève-t-il, louant le durcissement des règles concernant le renvoi dans leur pays d'origine des demandeurs d'asile non admissibles dans l'UE.

Viktor Orban soutient que les demandes d'asile doivent être gérées dans des "hotspots" en dehors de l'UE, une mesure jugée quasiment impossible à appliquer en raison de problèmes pratiques et juridiques, et que les demandeurs aux portes de l'Europe doivent être être enfermés dans des centres de rétention.

Les organisations de défense des droits de l'homme dénoncent depuis longtemps les conditions de détention des migrants en Hongrie et Budapest a perdu plusieurs recours devant la justice européenne sur sa gestion des demandeurs d'asile depuis la crise migratoire de 2015.

"NOUS SOMMES PLUTÔT TÊTUS"

Viktor Orban, qui se veut le champion de la droite anti-immigration en Europe, assume sa politique en assurant que les demandes d'asile peuvent être traitées dans les ambassades de Hongrie à l'étranger.

"Personne ne peut entrer sur le territoire hongrois sans avoir complété une procédure de demande légale et obtenu une autorisation claire pour le faire", dit-il. "L'immigration en Hongrie est une question de sécurité nationale."

Le Premier ministre hongrois, ancien libéral et militant anticommuniste, dit vouloir protéger ce qu'il considère comme l'identité culturelle chrétienne de l'Europe et rejette la notion de société multiculturelle.

"En Hongrie, nous sommes très stricts sur le fait que nous n'aimerions pas avoir une société parallèle, une société ouverte ou une culture mixte", affirme-t-il. "Nous ne pensons pas que le mélange d'une société musulmane et d'une société chrétienne puisse être pacifique et assurer la sécurité et la qualité de vie du peuple."

Selon lui, s'il était appliqué tel quel, le projet de réforme de la politique migratoire proposé par la Commission obligerait Budapest à accueillir des migrants arrivés en Italie ou en Grèce.

"C'est un point très problématique", dit-il. "Ce n'est rien d'autre que de la relocalisation baptisée autrement. Et nous rejetons toujours la relocalisation."

Alors que les tractations entre pays membres n'ont pas encore commencé, Viktor Orban juge qu'il est trop tôt pour que la Hongrie envisage d'opposer son veto à cette réforme. Il faudra des mois avant que tous les Etats membres aient clarifié leur position.

Il ne fait cependant à ses yeux aucun doute que Budapest n'acceptera rien qui pourrait conduire la Hongrie à être contrainte d'accueillir des personnes en provenance du Moyen-Orient ou d'Afrique.

"Ce point n'est pas acceptable pour le peuple hongrois", prévient-il. "C'est pourquoi sur certains points, nous sommes plutôt têtus."

(Version française Juliette Portala et Jean-Stéphane Brosse)