Objectif Lune : après l’échec de la Russie avec Luna-25, l’Inde toujours dans la course

ESPACE - Cette mission n’avait que 70% de chance de réussir, avait prédit le patron de Roscsomos, l’agence spatiale russe. Et la réalité s’est située dans les 30 % restants : Luna 25, la sonde de la Russie, s’est finalement écrasée sur la surface lunaire dimanche 20 août. Un échec pour le pays, près de 50 ans après leur dernière mission lunaire.

Mais tout n’est pas perdu pour les scientifiques car en parallèle de la mission russe Luna-25, une autre mission indienne, dénommée Chandrayaan-3, doit elle aussi tenter d’alunir dans les prochains jours. Deux missions qui montrent le nouvel intérêt porté à la Lune, que l’on décrypte dans la vidéo en tête de l’article.

La Lune, abandonnée puis courtisée

Depuis que les États-Unis ont été les premiers à poser le pied sur la Lune en 1969, battant ainsi le rival soviétique, l’enthousiasme qui entourait le satellite de la Terre a rapidement diminué. Trois ans plus tard les Américains ont mis un terme au programme Apollo jugé trop cher. Cela fait maintenant 51 ans que l’humanité n’a pas foulé le sol lunaire.

20 juillet 1969 - L’astronaute Edwin E. Aldrin Jr., pilote du module lunaire, pose à côté du drapeau des États-Unis déployé lors d’une activité extravéhiculaire Apollo 11 (EVA) sur la surface lunaire.
20 juillet 1969 - L’astronaute Edwin E. Aldrin Jr., pilote du module lunaire, pose à côté du drapeau des États-Unis déployé lors d’une activité extravéhiculaire Apollo 11 (EVA) sur la surface lunaire.

Mais les missions spatiales de grande ampleur ont récemment retrouvé leur attractivité, avec notamment le programme Artemis des États-Unis qui prévoit de renvoyer des astronautes sur la Lune en 2025. Et surtout, d’autres pays ont mis en place un programme spatial. Parmi eux, l’Inde, qui est devenu en 2014 le premier pays asiatique à mettre un satellite en orbite autour de Mars.

Avec Chandrayaan-3, « l’Inde veut prouver sa capacité technologique et passer d’une phase d’utilisation des satellites pour des besoins terrestres à une phase d’exploration spatiale », explique Isabelle Soubrès-Verger, géographe et directrice de recherche au CNRS, spécialiste des questions de géopolitique de l’espace. Après l’échec de la mission Chandrayaan-2 il y a quatre ans, l’Inde pourrait bientôt rejoindre le club très fermé des pays ayant réussi un alunissage, qui comprend seulement la Russie, les États-Unis et la Chine.

Quant à la Russie, sa dernière mission lunaire remonte à 1976, à l’époque de l’URSS. Reprendre le programme Luna est une manière pour le pays de renforcer sa position de grande puissance spatiale, malgré les distances prises par certains pays du fait de la guerre en Ukraine. Mais ces nouvelles missions lunaires ont aussi pour but de consolider le partenariat de la Russie avec la Chine qui compte installer une base sur la Lune en 2030.

« Le programme lunaire russe est aujourd’hui construit dans le cadre d’une coopération avec le programme lunaire chinois. Ce sont des missions parallèles, distinctes, nationales mais dans une perspective de complémentarité et pour démontrer une alternative au programme Artemis »,précise Isabelle Soubrès-Verger précise.

Pourquoi le pôle Sud de la Lune est si prisé

Si les deux pays avaient pour but de faire alunir leur sonde au même moment, parler de « course » semble assez réducteur pour la géographe. « Je pense que cette idée de compétition c’est vraiment quelque chose qu’on plaque parce que ça correspond aux enjeux politiques terrestres. Mais d’un point de vue scientifique, ce sont des missions complémentaires et les données seront échangées entre les différents partenaires ». L’ISRO, l’agence spatiale indienne, avait même souhaité bonne chance à Roscomos.

La particularité de ces missions repose aussi sur leur destination, puisque Chandrayaan-3 comme Luna 25 devaient alunir au pôle sud de la Lune. Une première dans l’histoire spatiale, car jusqu’à maintenant, les différentes agences visaient la zone équatoriale, bien moins risquée sur le plan technique.

Et si les scientifiques s’imposent une telle difficulté, c’est qu’ils ont identifié de l’eau glacée dans cette zone ; or cette eau pourrait devenir essentielle pour les prochaines missions spatiales. L’objectif plus lointain étant de faire de la Lune une base spatiale pour que les astronautes puissent aller sur Mars.

« On a besoin d’eau pour que les équipages puissent boire ou produire des aliments, pour leur hygiène, et on a surtout besoin d’eau pour le carburant. Parce que si on décolle de la Lune, et comme la gravité lunaire est beaucoup plus faible que la gravité terrestre, on a moins besoin d’énergie. Donc si on peut fabriquer du carburant depuis les ressources de la Lune, ça fait gagner énormément d’énergie et ça a un impact moindre sur notre environnement terrestre », détaille Stéphanie Lizy-Destrez, enseignante-chercheuse à l’ISAE-SUPAERO.

Mais avant même d’envisager pouvoir un jour aller sur Mars, l’Inde va d’abord devoir réussir sa mission. Après l’échec de la Russie, tous les regards sont désormais tournés vers elle. Car si la mission est un succès, celle-ci se révélera déterminante pour les programmes spatiaux des différentes agences dans le monde.

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