Nucléaire: Greenpeace alerte sur la sécurité du combustible usé

La centrale nucléaire de Golfech. Les piscines d'entreposage de combustible nucléaire usé des centrales françaises et belges sont très mal protégées face aux risques d'actes malveillants et d'attaques terroristes, selon les conclusions d'un rapport d'experts publiées mardi par Greenpeace. /Photo prise le 26 septembre 2017/REUTERS/Régis Duvignau

PARIS (Reuters) - Les piscines d'entreposage de combustible nucléaire usé des centrales françaises et belges sont très mal protégées face aux risques d'actes malveillants et d'attaques terroristes, selon les conclusions d'un rapport d'experts publiées mardi par Greenpeace. Selon ce rapport commandé par l'organisation non gouvernementale, les piscines des centrales - pouvant chacune contenir plusieurs centaines de tonnes de combustible usé - sont particulièrement exposées aux risques d'attaques par avion et par hélicoptère et ne résisteraient pas à des tirs d'armes antichar. Des attaques de ce type pourraient donc provoquer "une catastrophe nucléaire majeure" mettant les populations en danger dans des rayons allant jusqu'à 250 km autour des centrales, estime Greenpeace, qui épingle la conception même des piscines d'entreposage - aux murs insuffisamment épais selon l'ONG -, utilisées pour refroidir des matières hautement radioactives. L'ONG demande en conséquence à EDF de réaliser des travaux nécessaires pour "bunkériser" ces installations, pour un coût estimé à environ un milliard d'euros par piscine selon Yves Marignac, directeur de l'agence d'étude et de conseil WISE-Paris et coauteur du rapport. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire, a déclaré sur RTL que le gouvernement allait "examiner" le rapport de Greenpeace, qui lui a été remis mardi. "La France a les mécanismes les plus robustes et les plus performants au monde en matière de sécurité et de sûreté", a-t-il dit. Le ministère de l'Intérieur a précisé avoir "considérablement renforcé depuis 2009 les dispositifs de sécurité dans et aux abords des sites, sur lesquels une unité spécialisée de la gendarmerie est systématiquement présente". "COOPÉRATION ÉTROITE AVEC L'ETAT" La France compte 63 piscines de combustible, une sur chacun de ses 58 réacteurs en service, une dans l'ex-site de Creys-Malville et quatre à La Hague (Manche) sur un site exploité par Areva et considéré comme particulièrement fragile par les experts diligentés par Greenpeace. "EDF travaille en coopération étroite avec l'Etat français pour assurer en permanence la protection des centrales nucléaires", a déclaré une porte-parole de l'électricien public, ajoutant que la conception des piscines de combustibles intégrait les risques des séismes et d'inondations mais aussi d'attaques terroristes. Philippe Sasseigne, directeur du parc nucléaire d'EDF, a précisé au journal Le Parisien que le groupe prévoyait d'investir 700 millions d'euros supplémentaires d'ici à 2023 pour renforcer la sécurité, dans le cadre du Grand Carénage de 50 milliards d'euros sur 10 ans qui vise à prolonger la durée de vie des centrales. Areva, de son côté, a déclaré que le risque terroriste était pris en compte par le groupe et les autorités depuis les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, avec des procédures renforcées dans le cadre du plan Vigipirate actuellement en vigueur. "La Hague est un site extrêmement sécurisé", a dit Areva, en citant notamment sa couverture radar permanente en liaison avec l’armée de l’air et son interdiction de survol à moins de 2.000 mètres d'altitude et dans un rayon de trois kilomètres. Quant aux piscines de La Hague, a ajouté Areva, elles sont dans une zone protégée par plusieurs barrières et inaccessible avec des véhicules, avec "de nombreux bâtiments qui assurent une protection contre l’impact d’un avion gros porteur". Engie, qui exploite le parc nucléaire belge, n'a pas fait de commentaire dans l'immédiat. L'Autorité de sûreté nucléaire a pour sa part souligné qu'elle n'était pas chargée de la sécurité des centrales françaises, qui consiste à les protéger contre des actions d'origine malveillante tandis que la sûreté concerne la maîtrise des risques induits par leur exploitation. (Benjamin Mallet, avec Simon Carraud et Geert De Clercq, édité par Dominique Rodriguez)