Nouvelle-Calédonie : A l’Assemblée, un vote crucial qui peut ouvrir la voie à un nouveau Congrès à Versailles
POLITIQUE - A 17.000 kilomètres de Nouméa, l’Assemblée nationale se penche ce lundi 13 mai sur la Nouvelle-Calédonie. Les députés doivent se prononcer sur le projet de révision constitutionnelle visant à élargir le corps électoral propre au scrutin provincial de l’archipel. Une réforme aux multiples enjeux, source de tensions sur place entre loyalistes et indépendantistes.
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Après le vote favorable du Sénat, une adoption à l’identique est nécessaire au Palais Bourbon pour faire cheminer ce projet gouvernemental, qui sera soumis à un vote solennel mardi après-midi dans l’hémicycle. Une validation par les députés ouvrirait alors la voie à une réunion du Parlement en Congrès pour réformer la Constitution, mais la date de cette grand-messe parlementaire à Versailles n’est pas encore fixée, même si la fin du mois de juin est parfois avancée.
Emmanuel Macron a en tout cas promis de ne pas convoquer le Congrès « dans la foulée » du vote de l’Assemblée selon son entourage, pour laisser une dernière chance aux discussions entre les parties prenantes locales en vue d’un accord institutionnel global. Ces dernières seront très prochainement invitées à Paris pour « une rencontre avec le gouvernement », a fait savoir dimanche l’entourage du président, qui veut « privilégier le dialogue ».
Quels enjeux ?
Car derrière ce texte de loi assez technique se joue une grande partie de l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie. La preuve ? la mobilisation constante que connaît l’archipel ces derniers jours, avec plusieurs interpellations. Lundi, la journée a été « très mouvementée » à Nouméa, raconte le média local La 1ère, avec des manifestations, des feux, et des blocages.
Sur le fond, deux camps s’opposent. Celui des non-indépendantistes, favorables à la réforme, et celui des indépendantistes qui y voient au contraire un passage en force de l’État pour « minoriser encore plus le peuple autochtone kanak ». Ces derniers, regroupés au sein de la Cellule de coordination des actions de terrain (CCAT), ont indiqué que la mobilisation s’intensifierait en cas d’adoption du projet de loi.
Les tensions sont aussi exacerbées par un contexte économique très pesant dans l’archipel, avec une grave crise de la filière nickel à laquelle le gouvernement tente de répondre par un plan de redressement décrié.
Concrètement, la réforme constitutionnelle vise à ouvrir les élections provinciales aux résidents installés depuis au moins dix ans. Prévu à ce stade au plus tard le 15 décembre, ce scrutin est essentiel sur l’archipel où les trois provinces détiennent une grande partie des compétences. Établi en 1998 par l’accord de Nouméa, le corps électoral est en effet gelé, ce qui a pour conséquence, 25 ans plus tard, de priver de droit de vote près d’un électeur sur cinq.
La gauche s’oppose à la révision en l’état
« Chacun constate que le corps électoral gelé n’est plus conforme aux principes de la démocratie », martèle le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, qui s’est rendu à de multiples reprises en Nouvelle-Calédonie ces dernières années et constate qu’« aucune des discussions n’a abouti à un accord global » malgré plusieurs tentatives. Le gouvernement « prend donc ses responsabilités », a prévenu le ministre, qui plaide pour une adoption du texte sans modification par l’Assemblée nationale, tout en laissant la porte ouverte à un accord institutionnel trouvé localement.
Au Sénat, un mécanisme a été ajouté pour permettre la suspension de cette réforme constitutionnelle si un accord local survient jusqu’à 10 jours avant les prochaines élections provinciales. Le gouvernement avait initialement fixé une date limite au 1er juillet, perçue comme un « ultimatum » par les oppositions.
À l’Assemblée nationale, le projet de loi a été adopté sans encombre en commission avec le soutien du camp présidentiel, de la droite et de l’extrême droite, malgré l’opposition de la gauche qui a déposé une série d’amendements. Dans une tribune publiée ce lundi par Le Monde, Jean-Luc Mélenchon et Mathilde Panot, la présidente du groupe insoumis à l’Assemblée fustigent quant à eux « une véritable bombe contre la paix civile » et dénoncent la « méthode inadmissible » de l’exécutif.
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