Bombardements et accrochages au sol se poursuivent en Turquie

ANKARA (Reuters) - Les hostilités se sont poursuivies mardi dans le sud-est de la Turquie, l'armée frappant de nouvelles cibles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qui a revendiqué de son côté l'attentat à la bombe commis la veille contre un poste de police à Istanbul. L'armée a annoncé avoir bombardé depuis lundi 17 positions des miliciens kurdes dans la province de Hakkari, frontalière de l'Iran et de l'Irak. Selon des sources au sein des forces turques de sécurité, le PKK a lancé un assaut contre un poste de l'armée dans la province de Sirnak, qui jouxte celle de Hakkari, et tué un soldat. Un membre du PKK a parallèlement été tué au cours d'un accrochage dans la province de Bingol, selon les services du gouverneur local. Le pays est secoué par un regain de violences depuis le mois de juillet : le PKK a alors lancé une série d'attaques contre les forces de sécurité et le gouvernement a entamé une campagne de bombardements contre l'organisation séparatiste kurde. Lundi, des attaques visant les forces de sécurité dans le sud-est du pays ont coûté la vie à cinq policiers et soldats tandis qu'à Istanbul, un commissariat de police et le consulat des Etats-Unis étaient la cible d'attaque. Les coups de feu tirés contre la représentation américaine ont été revendiqués par un groupuscule révolutionnaire d'extrême gauche, le Parti-Front révolutionnaire de libération du peuple (DHKP-C). Le PKK a revendiqué de son côté l'attentat à la voiture piégée suivi de violents échanges de tirs dans la nuit de dimanche à lundi contre un commissariat de police du quartier de Sultanbeyli, sur la rive asiatique du Bosphore. La guérilla kurde confirme que trois de ses combattants ont péri dans l'opération. Depuis le tournant stratégique pris après l'attentat suicide commis à Suruç, le 21 juillet, le gouvernement turc dit livrer une "guerre synchronisée contre le terrorisme", dirigée à la fois contre le groupe djihadiste Etat islamique (EI) présent en Syrie et le PKK dans le nord de l'Irak. Mais en concentrant largement ses frappes sur le PKK, tant dans le nord de l'Irak qu'à l'intérieur des frontières turques, Ankara alimente les soupçons de la communauté kurde qui estime que la lutte contre les djihadistes de l'EI n'est qu'un prétexte pour endiguer les ambitions territoriales kurdes. Le président turc, Recep Tayip Erdogan, est également accusé de chercher à discréditer le Parti démocratique des peuples (HDP), une formation initialement pro-kurde mais qui a réussi à élargir sa base électorale. La percée du HDP aux élections législatives de juin explique en grande partie pourquoi le Parti de la justice et du développement (AKP), la formation islamo-conservatrice du président, a perdu sa majorité absolue au Parlement lors de ce scrutin. Des sondages récents ont montré que si de nouvelles élections avaient lieu aujourd'hui, l'AKP pourrait retrouver sa majorité absolue. Le HDP perdrait, lui, du terrain. (Orhan Coskun, Seyhmus Cakan et Ece Toksabay, Simon Carraud et Henri-Pierre André pour le service français)