En Norvège, le musée Kunstsilo a un grain

Si vous vous êtes déjà demandé ce que ça fait d’être aussi insignifiant qu’un grain de maïs, vous pouvez désormais en faire l’expérience à Kristiansand, une ville dans le sud de la Norvège. Du quatrième étage de son nouveau musée d’art appelé Kunstsilo, taillé dans un ancien silo à grains des années 1930, vous pouvez regarder dans un vertigineux tube en béton qui donne sur des groupes de personnes ayant l’air de fourmis, en contrebas. Ou vous pouvez lever les yeux vers de minuscules cercles de ciel à travers d’autres conduits en béton. Vous pouvez imiter le trajet d’un grain de céréale en prenant un escalier en colimaçon dans l’un des cylindres ou mettre vos nerfs à l’épreuve en traversant une terrasse au sol en verre, suspendue au-dessus d’un autre conduit, et ainsi flotter au-dessus d’un abysse tubulaire. Cet espace est grandiose, et nous n’avons pas encore parlé des œuvres d’art.

Cette colossale montagne de béton, qui contenait jadis 15 000 tonnes de céréales, héberge aujourd’hui la plus grande collection d’art moderne nordique du monde [telle que se définit la collection Tangen]. C’est un butin de 5 500 œuvres qui comprend des peintures, des dessins, des objets en céramique, des sculptures et des installations architecturales grandeur nature, et qui retrace le siècle écoulé de l’abstraction, du surréalisme et de l’expressionnisme en Norvège, en Suède, en Finlande et au Danemark – le tout dans l’un des plus grands symboles de la modernité elle-même.

Des projets inaboutis

Pour les modernistes, les silos étaient l’incarnation parfaite de la forme déterminée par la fonction, des monuments de stockage et des symboles du commerce international, dépourvus de toute fioriture superflue. Ils gardent un attrait irrésistible, celui de cathédrales industrielles à la géométrie pure. Mais que faire, aujourd’hui, de ces géants obsolètes ?

“Cela a été un véritable casse-tête, résume Mathias Bernander, maire de Kristiansand, où les silos étaient vides depuis 2008 et occupaient un excellent emplacement au bord de l’eau. Le site était protégé mais inutile.” Dessinés par l’un des principaux architectes fonctionnalistes norvégiens, Arne Korsmo, les 30 cylindres en béton avaient été classés en 2010, sans qu’il y ait pourtant d’idée concernant leur réhabilitation. Les projets d’en faire un hôtel s’étaient révélés impossibles. “Le site ne valait rien”, ajoute Mathias Bernander.

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