Nobel de physique: l'humilité d'Anne L'Huillier, retournée enseigner après avoir appris qu'elle était lauréate

Nobel de physique: l'humilité d'Anne L'Huillier, retournée enseigner après avoir appris qu'elle était lauréate

Un moment historique et une journée de routine. Mardi à la mi-journée, la chercheuse franco-suédoise Anne L’Huillier, 65 ans, a reçu le prix Nobel de physique en compagnie de Pierre Agostini et Ferenc Krausz pour leurs travaux sur l’attoseconde. Elle est ainsi devenue la deuxième Française à recevoir la distinction du Nobel de physique depuis Marie Curie en 1903 et seulement la cinquième femme dans cette discipline.

Celle qui enseigne depuis 25 ans la physique atomique à l'université de Lund, en Suède, a appris son succès alors qu'elle dispensait justement un cours dans cet établissement. Un cliché diffusé sur les réseaux sociaux immortalise ce moment et montre Anne L’Huillier, téléphone en main pendant la pause de son cours. Elle a ensuite repris sa classe comme si de rien n'était, sans en parler à personne.

"On voyait qu'il y avait quelque chose"

Aron Allen, un étudiant qui participait au cours de mardi, raconte à BFMTV les minutes qui ont suivi le retour en classe.

"Quand elle est revenue pour continuer le cours, elle nous a dit qu'on allait terminer un peu plus tôt aujourd'hui parce qu'elle avait quelque chose après", décrit-il. "On a remarqué qu'elle avait l'air contente. Elle avait un peu plus de mal à se concentrer pour nous faire le cours même si elle le faisait très bien. Elle souriait, oui on voyait qu'il y avait quelque chose. Elle ne voulait rien dire parce qu'à ce moment-là, cela n'avait pas encore été annoncé", ajoute-t-il.

Selon lui, Anne L'Huillier a simplement clos son cours avec un laconique "bon, à demain", avant de quitter les lieux.

La nouvelle de la victoire d'Anne L'Huillier s'est rapidement propagée dans l'université et quelques dizaines d'élèves se sont rendus devant sa classe pour l'applaudir. Une collecte a également été mise en place afin d'offrir des fleurs à la professeure, qui doit encore donner un cours ce mercredi.

Travaux de longue haleine

La découverte qui lui a permis d'obtenir le Nobel remonte à 1987, quand cette agrégée de mathématiques effectue au Commissariat à l'énergie atomique (CEA, un organisme de recherche français) la première démonstration expérimentale d'impulsion laser à l'échelle de l'attoseconde, un milliardième de milliardième de seconde.

Dans son intervention mardi, la chercheuse a insisté sur l'importance de "financer la recherche fondamentale", avant d'espérer en tirer des bénéfices concrets.

Car à l'époque, "il s'en est fallu de peu pour que ces études soient interrompues", explique à l'AFP Pascal Salières, qui poursuivait alors une thèse sous sa direction.

Les travaux d'Anne L'Huillier étaient considérés "comme une curiosité de laboratoire", souligne l'actuel responsable de la plateforme Attolab au CEA, qui salue "sa persévérance à porter un sujet qui occupait alors seulement deux ou trois laboratoires dans le monde".

Après le CEA, elle a rejoint pour y enseigner en 1995 l'Université suédoise de Lund, où elle a rencontré le professeur de physique qui deviendra son mari.

Article original publié sur BFMTV.com