Nigeria : critiquer une sauce tomate, c’est s’exposer à la “loi cybercriminalité”

En septembre 2023, Chioma Okoli, une femme nigériane de 39 ans originaire de Lagos, avait publié une série de messages sur les réseaux sociaux, critiquant la teneur en sucre d’une sauce tomate de la marque Nagiko. Quelques jours plus tard, elle était arrêtée par trois policiers à la sortie de l’église. “On m’accusait d’extorsion de fonds, de chantage et d’association de malfaiteurs”, explique-t-elle à Al-Jazeera.

“Okoli fait partie de ces Nigérians qui ont été arrêtés ou accusés d’avoir enfreint les lois nigérianes sur la cybercriminalité, qui visent à protéger des informations nationales sensibles et aussi à prémunir les citoyens contre le cyberharcèlement”, ajoute le site panarabe.

Le texte sur la cybercriminalité a été adopté en 2015 mais a très vite été dénoncé par les groupes de défense des droits pour son caractère “nébuleux”. Ces derniers estiment qu’il pourrait surtout être utilisé pour réduire au silence journalistes, militants et dissidents. La loi a d’ailleurs dû être amendée en 2022 après avoir été épinglée par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao).

COURRIER INTERNATIONAL
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Cela n’a pas empêché Chioma Okoli de vivre un calvaire. La mère de famille a été transférée à Abuja pour y être interrogée par la police.

“Eric Umeofia, PDG de […] la société qui produit la purée de tomates Nagiko, s’est rendu également au commissariat. Okoli a été conduite avec lui dans un bureau, où il lui a hurlé dessus, tandis qu’elle pleurait.”

Le fabricant réclame des dommages et intérêts à hauteur de 5 milliards de nairas (3,1 millions d’euros). La police a exigé le retrait de la cagnotte en ligne destinée à financer ses frais d’avocat.

“L’affaire Okoli provoque un tollé parmi les Nigérians et les défenseurs des droits, pour qui de telles arrestations constituent une atteinte à la liberté d’expression.” Al-Jazeera documente également le cas de Daniel Ojukwu, journaliste arrêté et emprisonné à Lagos en mai.

Interrogé par le titre, l’intéressé pense que cette arrestation est la conséquence de son travail d’enquête sur de possibles faits de corruption d’un conseiller du gouvernement. La police invoque quant à elle “un témoignage concernant des transactions financières et l’exécution de contrats”, précisant que ces faits tombent sous le coup de la loi sur la cybercriminalité.

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