Nicolas Sarkozy rejugé pour corruption dans l’affaire des « écoutes »

Former France's president Nicolas Sarkozy attends the UEFA Champions League group H football match between Paris Saint-Germain (PSG) and SL Benfica, at The Parc des Princes Stadium, on October 11, 2022. (Photo by FRANCK FIFE / AFP)
FRANCK FIFE / AFP Former France's president Nicolas Sarkozy attends the UEFA Champions League group H football match between Paris Saint-Germain (PSG) and SL Benfica, at The Parc des Princes Stadium, on October 11, 2022. (Photo by FRANCK FIFE / AFP)

JUSTICE - Nicolas Sarkozy de retour à la barre : l’ancien président est rejugé en appel pour corruption et trafic d’influence à partir de ce lundi 5 décembre à Paris dans l’affaire des « écoutes », aux côtés de son avocat Thierry Herzog et de l’ex-haut magistrat Gilbert Azibert.

En première instance, à l’issue d’un procès électrique où il avait dénoncé des « infamies », Nicolas Sarkozy s’était vu infliger le 1er mars 2021 trois ans d’emprisonnement, dont un ferme, devenant ainsi le deuxième président de la Ve République condamné par la justice, après Jacques Chirac en 2011.

La même peine avait été prononcée contre ses deux coprévenus dans ce sinueux dossier, qui fait se télescoper deux retentissantes affaires judiciaires et trouve son origine dans les interceptions téléphoniques de conversations entre Nicolas Sarkozy et Me Herzog début 2014.

À l’époque, les deux téléphones de l’ex-homme fort de la droite ont été « branchés » par les juges chargés de l’enquête sur des soupçons de financement libyen de sa campagne de 2007, qui lui valent aujourd’hui une quadruple mise en examen.

Les enquêteurs découvrent alors l’existence d’une troisième ligne mise en service le 11 janvier 2014 sous l’alias « Paul Bismuth » - du nom d’une connaissance de lycée de Me Herzog - et dédiée aux échanges entre l’ex-président (2007-2012) et son avocat et ami proche.

Au fil de conversations qu’ils pensent à l’abri des oreilles indiscrètes se dessine, selon l’accusation, un pacte de corruption noué avec Gilbert Azibert, avocat général à la Cour de cassation, qui aurait usé de son influence contre la promesse d’une intervention pour sa carrière.

« Coup de pouce »

Ce haut magistrat est accusé d’avoir œuvré en coulisses pour peser sur une décision qui intéressait au plus haut point l’ancien chef de l’État et devait être rendue par la Cour de cassation.

À l’époque, la haute juridiction était saisie d’un pourvoi de Nicolas Sarkozy, qui voulait faire annuler la saisie de ses agendas présidentiels dans le cadre de l’enquête pour abus de faiblesse sur l’héritière de L’Oréal Liliane Bettencourt.

Gilbert Azibert est soupçonné d’avoir eu connaissance, en amont, d’informations confidentielles et d’avoir tenté d’influencer des conseillers participant aux délibérations.

« Il a bossé, hein ? », se félicite Me Herzog sur la ligne « Bismuth » où il fait part à Nicolas Sarkozy du souhait du magistrat d’obtenir « peut-être un coup de pouce » pour un poste à Monaco.

D’après les interceptions, Nicolas Sarkozy promet alors à son avocat d’activer ses réseaux sur Le Rocher pour « faire monter » Gilbert Azibert. « Je m’en occuperai parce que moi je vais à Monaco et je verrai le Prince », assure-t-il.

Finalement, Gilbert Azibert ne décrochera pas le poste convoité et la Cour de cassation rejettera le pourvoi de Nicolas Sarkozy dans l’affaire des agendas. Le point de savoir s’il est intervenu auprès des autorités monégasques reste discuté.

Selon la défense, c’est la preuve que le pacte corruptif n’est qu’un « fantasme ».

« Injustice profonde »

Au contraire, en première instance, le tribunal correctionnel a considéré que la corruption était caractérisée dès lors qu’une récompense était proposée et acceptée en échange d’une contrepartie, que le but ait été ou non atteint.

Nicolas Sarkozy « s’est servi de son statut d’ancien président (...) pour gratifier un magistrat ayant servi son intérêt personnel », a tranché le tribunal.

Après sa condamnation, l’ex-président s’est dit victime d’une « injustice profonde » et la droite a crié haro sur le parquet national financier (PNF), qui avait confié l’enquête à deux juges d’instruction début 2014 et dont l’impartialité avait déjà été mise en cause par la défense lors du procès.

Les débats devant la cour d’appel, prévus jusqu’au 16 décembre, promettent d’être moins orageux mais une zone d’ombre au moins demeurera.

Fin février 2014, un brusque changement de ton dans les échanges entre Nicolas Sarkozy et son avocat avait convaincu les enquêteurs qu’ils se savaient sur écoutes - ce qu’ils contestent.

Une enquête distincte, ouverte par le PNF, n’a pas permis d’identifier une éventuelle « taupe » qui les aurait informés.

Mais elle a provoqué son propre séisme - l’affaire des « fadettes » - dont une des répliques est le renvoi en procès de l’actuel garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti pour avoir lancé des poursuites disciplinaires contre trois magistrats financiers.

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