"Ils n'hésitent pas à se faire des crasses" : tensions entre Attal et Braun-Pivet sur les débats à l'Assemblée
Le Premier ministre et la présidente de l'Assemblée nationale peinent à se mettre d'accord sur un nouveau format pour les questions au gouvernement, désertées par plusieurs ministres.
Des débats boudés. Les QAG (questions au gouvernement, NDLR), rendez-vous hebdomadaire de la vie politique française entre les ministres et l'Assemblée nationale, n'attirent plus les foules. Un constat devenu une préoccupation à la fois pour Matignon et le Palais-Bourbon, qui peinent à se mettre d'accord.
Pour tenter de relancer l'intérêt du gouvernement pour ces échanges avec les députés, la présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet a fait un premier pas il y a quelques mois: étendre le rendez-vous sur deux jours, le mardi et le mercredi, et non plus sur deux heures le mardi.
Mais force est de constater, que lors de la séance du mercredi, les bancs des ministres sont toujours désespérément clairsemés, ce que nous confirment les principaux concernés.
"Les macronistes répondent par des éléments de langage et ne disent rien. Le macronisme a tué les joutes parlementaires, tout est posture", déplore un député de l'opposition de gauche.
"On a souvent des ministres qui papotent pendant qu'on parle", confie cette même source, "ils ont oublié qu'ils étaient les invités de l'Assemblée nationale (..) c'est la traduction concrète du désintérêt du parlement et des parlementaires. Édouard Philippe était plus politique".
"Les QAG ça les emmerde"
"Si tous les ministres avaient des ministres délégués ou secrétaires d'État, il n'y aurait plus aucun ministre sur les bancs", confie à BFMTV une membre du gouvernement, qui a aussi constaté la désertion.
"Gérald Darmanin, Bruno Le Maire, tout le monde sèche désormais ouvertement les QAG car ça les emmerde", estime-t-elle.
Cette même membre de l'exécutif avance "un problème de niveau général: les ministres trouvent les députés insupportables et nuls, et les députés ne sont pas contents des réponses apportés par des secrétaires d'État et des ministres délégués pas au niveau, pas du tout politiques."
"Yaël ne tient pas son hémicycle"
Du côté des députés Renaissance, c'est plutôt vers les oppositions qu'il faut chercher la faute: "le brouhaha permanent, la qualité des QAG, et le fait que tout paraît joué d'avance (...) ça se ressent de plus en plus", confie un parlementaire de la majorité.
D'autres, plus sévères, avancent que le problème ne vient pas tant des bancs des ministres ou des oppositions mais du perchoir, tenu par Yaël Braun-Pivet.
"Yael ne tient pas son hémicycle, elle fait parfois des rappels pour se faire bien voir de son opposition mais ça ne sert à rien, ils ne la respectent pas. Typiquement, la déclaration de politique générale de Gabriel Attal, elle n'a rien fait pour que l'hémicycle se tienne bien", tance une députée de la majorité.
Les réponses de Gabriel Attal uniquement le mercredi?
Si certains députés d'opposition seraient favorables à une présence obligatoire des députés et ministres, la présidente de l'Assemblée cherche une nouvelle formule, proposée tout d'abord à Élisabeth Borne qui l'avait refusé: réserver les QAG du mercredi aux réponses du Premier ministre qui, aujourd'hui, doit réserver ses réponses aux présidents de groupe.
Favorable, Gabriel Attal serait prêt à se plier à l'exercice mais ses débuts n'ont pas été marqués par une relation très chaleureuse avec la Présidente de l'Assemblée : "Elle n'a pas apprécié sa sortie dans la presse laissant croire que cette formule du mercredi était son idée", relate une cadre de la majorité.
"Lorsqu'ils peuvent se faire des crasses, ils n'hésitent pas", confie cette même source.
Un récent rappel à l'ordre peu apprécié par Matignon
Dernier épisode en date: le rappel à l'ordre des ministres par Yaël Braun-Pivet pour répondre aux questions des députés. Le 28 février dernier, une députée LR interpelle le gouvernement sur le projet d'installation d'un village olympique saoudien aux Invalides. La secrétaire d'État Patricia Miralles, chargée des Anciens combattants et de la Mémoire, déclare alors "comprendre les interrogations" de la députée "mais ne répond pas sur des choses qui ne sont pas faites, ni signées avec aucun accord".
Yaël Braun-Pivet rappelle alors à la membre du gouvernement qu'il lui reste du temps de parole, et Patricia Miralles ajoute que "madame la députée Serre connaît le travail que nous avons déjà effectué ensemble, et elle sait que je lui apporterai une réponse". La présidente de l'Assemblée nationale s'adresse alors à la ministre Marie Lebec, en charge des Relations avec le Parlement et la remercie "d'indiquer à chaque ministre qu'il faudrait vraiment qu'il réponde aux questions que lui pose le Parlement".
"Je rappelle que le gouvernement est responsable devant le Parlement", conclut alors Yaël Braun-Pivet.
Un épisode que Gabriel Attal n'aurait que très peu goûté, selon l'un de ses ministres.
"Gabriel était très mécontent du rappel à l'ordre de la Présidente", confie à BFMTV un membre du gouvernement. Cette même source avoue que, parfois, le niveau de réponse des ministres n'est pas à la hauteur: "j'ai conscience du faible niveau général des délégués qui ne savent pas répondre et passent leur temps à esquiver les questions".
Aucune date n'est envisagée pour l'heure pour enclencher le nouveau format avancé par Yaël-Braun Pivet, même si de l'avis de tous, cette expérimentation jusqu'à juin pourrait redynamiser un exercice qui a perdu en solennité. Les dix groupes doivent se prononcer prochainement sur la mise en application de ces "séances Attal" nouvelle formule.
Article original publié sur BFMTV.com
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