Pour nettoyer les eaux de la Seine, ces chercheurs ont une idée : recycler l’urine des Parisiens

600 logements pratiqueront le recyclage d’urine dans le nouveau quartier de Saint-Vincent-de-Paul, dans le 14ème arrondissement.
James O'Neil / Getty Images 600 logements pratiqueront le recyclage d’urine dans le nouveau quartier de Saint-Vincent-de-Paul, dans le 14ème arrondissement.

INNOVATION - Se lever le matin et aller aux toilettes, voilà un geste du quotidien qui semble parfaitement banal pour la plupart d’entre nous. Et pourtant, notre urine est bien plus précieuse que ce que l’on ne pense, et elle est au cœur du projet surprenant de chercheurs français.

L’eau en bouteille contient plus de particules de plastiques que ce que l’on pensait

Alors que les JO de Paris 2024 approchent, la propreté de la Seine est sur toutes les lèvres. En effet, le cours d’eau parisien sera au cœur de l’évènement et accueillera les épreuves du triathlon, de la natation en eau libre, et du paratriathlon. Une course contre la montre est donc lancée pour nettoyer le fleuve à temps, alors que la qualité des eaux fait toujours débat et que des associations alertent sur leurs résultats d’analyse.

L’un des problèmes ? Le déversement des eaux usées de certains foyers de la région parisienne directement dans le fleuve. La Ville de Paris a ainsi investi 1.4 milliards d’euros pour en venir à bout.

Recycler l’urine pour nettoyer la Seine

Pour l’équipe du programme de recherche-action Optimisation des cycles carbone, azote et phosphore en ville (Ocapi), dirigé par Fabien Esculier, une solution se trouverait peut-être dans les toilettes des Parisiens. C’est ce qu’il explique dans un article de la BBC. Lancé en 2014, le programme vise à recycler l’urine des Franciliens et l’utiliser pour remplacer les engrais industriels qui fertilisent aujourd’hui les champs de la région Île-de-France.

Fabien Esculier, dont l’équipe est basée sur le campus de la Cité Descartes à Champs-sur-Marne (77), arbore sur un badge une devise : « L’urine, c’est cool ». Il explique à la BBC que l’urine et les matières fécales étaient autrefois prisées pour leur potentiel de fertilisation. Selon ses recherches, près de la moitié des nutriments présents dans nos urines et matières fécales étaient recyclés au début du XXe siècle, contre seulement 5 % aujourd’hui. Fabien Esculier veut donc faire un saut dans le passé tout en innovant pour la planète, et il a pour cela une idée plus qu’originale : produire du pain et des biscuits.

« 25 millions de baguettes de pain chaque jour »

Le projet de Fabien Esculier ? Utiliser l’urine des Franciliens pour fertiliser les champs de blé de leur région. Toujours au stade expérimental, ce programme a déjà connu une première victoire en produisant sa première fournée de pain en 2019, sans aucune différence gustative rassure Fabien Esculier auprès du Parisien. Et le chercheur, qui a reçu en 2018 la médaille d’argent de l’Académie de l’agriculture de France, ne compte pas s’arrêter là.

« Si l’on récupérait les nutriments contenus dans l’urine des dix millions d’habitants de l’agglomération parisienne, cela permettrait de produire 25 millions de baguettes de pain chaque jour », affirme Fabien Esculier dans sa thèse.

Son ambition est donc désormais de généraliser ce projet et d’organiser la séparation et la collecte de l’urine à l’échelle de la capitale.

600 logements Parisiens concernés

Une stratégie environnementale qui est soutenue par la mairie de Paris, puisque la capitale la mettra en place à l’échelle de l’écoquartier Saint-Vincent-de-Paul dans le quatorzième arrondissement. Celui-ci devrait être complètement construit et aménagé d’ici 2028, et les toilettes des 600 logements du quartier seront équipées pour participer à la collecte et au recyclage des urines. L’engrais produit sera utilisé dans les parcs et jardins de la Ville.

Fabien Esculier reste néanmoins réaliste, et rappelle à la BBC que ce n’est pas un projet facile à mettre en place dans les infrastructures déjà existantes, notamment en raison du caractère historique de l’architecture parisienne. Reste donc à voir si cette collecte pas comme les autres peut être établie à une échelle plus large en France.

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