"Nationalité faciale", "régression ethnique"... Le discours décomplexé de la droite et son extrême

Peut-on faire un lien entre l'immigration et les émeutes de ces derniers jours? Oui, répondent plusieurs responsables de la droite et de son extrême. "Évidemment", a même estimé Marine Le Pen sur France 2, ce jeudi, allant jusqu'à affirmer que "tout le monde" opère une telle corrélation.

Tant pis si le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a, lui, rejeté toute "explication identitaire", soulignant notamment que "90% des émeutiers sont de nationalité française" et "10% étrangers".

"Est-ce qu'ils se sentent ou non français?"

"C'est une réalité fausse", a tenté la cheffe des députés RN, avant de se reprendre: "il ne ment pas bien sûr, mais il sait très bien qu'il y a une ultra majorité de personnes qui ont participé à ces émeutes qui se sentent étrangères ou qui sont d'origines étrangères".

Ce vendredi matin, la petite musique résonnait encore. Au tour cette fois de Jean-Philippe Tanguy d'entonner la chanson sur BFMTV-RMC. "Marine Le Pen dit évidemment vrai", a insisté le président délégué du groupe RN à l'Assemblée nationale, avant d'expliquer les propos de sa supérieure:

"Le lien qu'[elle] fait n'est pas sur la nationalité faciale des personnes qui sont dans ces quartiers. C'est: est-ce qu'ils se sentent ou non français?"

"Français de papier"

"Une nationalité faciale"? L'élu de la Somme s'est défendu de faire une distinction selon "la face". "Facial, c'est d'apparence à un papier. Quand on dit c'est facial, c'est un document", a-t-il justifié.

"Ils sont français, donc c'est contradictoire avec le sous-entendu dont vous me suspectez. Ce n'est pas du tout ce que j'ai voulu dire. Au contraire, j'aurais pu dire que 'facialement, ils ne sont pas français'. J'ai dit l'inverse: ils sont français, mais de papier. Ils ne le revendiquent pas, ils ne se sentent pas français", ajoute-t-il.

"Français de papier". L'expression avait été utilisée par Valérie Pécresse, dirigeante Les Républicains de la région Île-de-France, durant la campagne présidentielle 2022. Dans son camp, certains élus tiennent des discours semblables à ceux prononcés par l'extrême droite, quitte à distinguer les Français entre eux. À commencer par Bruno Retailleau.

"Ils sont comment français?"

"Certes, ce sont des Français" qui ont participé aux émeutes, "mais ce sont des Français par leur identité et malheureusement pour la deuxième, la troisième génération, il y a comme une sorte de régression vers les origines ethniques", a estimé le patron des sénateurs LR sur France Info ce mercredi.

Plus tard, lorsque Gérald Darmanin était entendu par la commission des lois du Palais du Luxembourg, la sénatrice LR Jacqueline Eustache-Brinio a eu des propos similaires, déclarant: "vous allez me dire la plupart des gens qui ont été arrêtés sont français. D'accord. Mais, ça ne veut plus rien dire aujourd'hui. Ils sont comment français? Moi, ça m'interroge."

"Derrière les costumes et les cravates"

En face, les insoumis multiplient les réactions. Régulièrement exclus de "l'arc républicain" par le camp présidentiel ou LR, ils renvoient l'ascenseur. "Et ces gens, au racisme dégoulinant, osent donner des leçons de bonne tenue républicaine... ", a twitté Clémentine Autain après la sortie de Bruno Retailleau.

Autre angle d'attaque: la respectabilité que tente d'acquérir le RN. "Derrière les costumes et les cravates, les fascistes sont toujours là", a écrit Mathilde Panot concernant les déclarations de Jean-Philippe Tanguy. Tout en taclant les troupes présidentielles: "Mais bien sûr, la Macronie préféra toujours le RN à LFI."

Article original publié sur BFMTV.com