Quand la musique servait à torturer les prisonniers des camps nazis

À Buchenwald, un orchestre accompagnait les entrées et sorties des « kommandos de travail » mais aussi les exécutions de prisonniers.  - Credit:DR
À Buchenwald, un orchestre accompagnait les entrées et sorties des « kommandos de travail » mais aussi les exécutions de prisonniers. - Credit:DR

« Elles sont gravées dans notre esprit […] car elles sont la voix du Lager [le terme allemand qui désigne les camps, NDLR], l'expression sensible de sa folie géométrique. […] Aujourd'hui encore, quand une de ces innocentes chansonnettes nous revient en mémoire, nous sentons notre sang geler dans nos veines et nous prenons conscience qu'être revenus d'Auschwitz tient du miracle », a écrit Primo Levi dans le récit qu'il a tiré en 1947 de son expérience concentrationnaire (Si c'est un hommeSe questo è un uomo en version originale). Une exposition* organisée au Mémorial de la Shoah à Paris donne à comprendre le sens de ce passage.

Loin de l'image qu'on a parfois voulu lui voir jouer comme « instrument de résistance » dans les camps, la musique fut, de fait, mise à contribution dans l'entreprise d'anéantissement nazie comme instrument de torture. Une douzaine de mélodies répétées tous les jours, matin, midi et soir (marches militaires et chansons populaires) scandaient la vie des déportés. Joués de manière lancinante, ces airs étaient indissociablement mêlés aux pires moments de la vie des prisonniers.

Perversité absolue

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L'une des rares photos de l'orchestre d'Auschwitz en 1941. © DRLa perversité des tortionnaires nazis était immense. Si certains d'entre eux, tels les « médecins » Johann Paul Kremer et Josef Mengele, prétendaient pleurer en écoutant du Wagner ou du Schumann, ils n'en accompagnaient pas moins de musique leurs expérimentations sanguinaires. Et [...] Lire la suite