Mort d'Émile: comment travaillent les experts de l'IRCGN chargés d'analyser les ossements

Une affaire de quelques heures seulement. Les experts de l'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN) ont rapidement établi dans la nuit de ce samedi 30 au dimanche 31 mars que le crâne et les os transmis par une randonneuse appartenaient bien au petit Émile, disparu il y a près de neuf mois.

Désormais, les membres de cet organisme vont devoir analyser ces restes humains pour éventuellement déterminer les circonstances de la mort du jeune enfant, âgé de deux ans et demi au moment de sa disparition. Ils sont six à être déployés ce lundi 1er avril à proximité du Haut-Vernet (Alpes-de-Haute-Provence) où se poursuivent les fouilles.

• Qu'est-ce que l'IRCGN et qui sont ses membres?

Situé à Pontoise, en banlieue parisienne, l'IRCGN est chargé "d'analyser de manière scientifique des preuves et des indices provenant d’une scène de crime, ou d'une catastrophe naturelle de grande ampleur", précise le site de la police nationale.

En ce sens, l'IRCGN peut "utilise[r] l'ensemble des méthodes d'analyse scientifiques utiles au travail d'investigation", comme, dans le cas d'Émile, la médecine légale ou l'anthropologie. Objectif: parvenir à "aider la procédure pénale et désigner les coupables".

Saisis à la demande de la police judiciaire ou des magistrats, ces gendarmes ne sont pas uniquement chargés d'analyser les éléments depuis un laboratoire, ils peuvent également être déployés sur le terrain, comme dans les recherches actuelles, concernant Émile. Ainsi, l'Ircgn est "également une unité militaire". En 2018, il comptait plus de 250 experts (médecins légistes, ingénieurs, chimistes, dentistes....)

• Pourquoi l'institut a-t-il été créé?

La création de cet institut remonte à 1987, soit trois ans après l'affaire Grégory. Il s'agit alors de développer l'investigation criminelle de la gendarmerie. Par la suite, l'IRCGN a joué un rôle déterminant dans plusieurs dossiers très médiatisés, dont celui du meurtre la petite Maëlys, en 2017.

"La voiture du suspect a été entièrement désossée afin de collecter des traces de sang. Ces indices ont permis de mettre le meurtrier (Nordahl Lealndais) face à ses contradictions", rappelle ainsi la police nationale.

Récemment, certains experts ont également participé aux enquêtes concernant la mutilation, en 2020, de nombreux animaux, dont notamment des chevaux. D'autres ont été envoyés en Ukraine en 2022, après le début de la guerre en Russie, pour aider les autorités sur place.

Plus généralement, "en 2017, l’institut a travaillé sur plus de 230.000 dossiers", précise la police nationale. "Cela représente plus de 350.000 analyses d’échantillons et plus de 800.000 actes techniques de laboratoire."

• Comment analysent-ils les ossements récupérés?

Dans le cas d'Émile, les médecins légistes vont analyser les ossements afin de trouver "des traces traumatiques dues à l'intervention d'un tiers ou un phénomène accidentel", explique à BFMTV Philippe Boxho, médecin légiste.

"Un maximum d'éléments, c'est un maximum de chances de trouver la vérité et de faire progresser l'enquête", ajoute-t-il.

En ce qui concerne la possible implication d'un tiers dans la mort d'Émile, Philippe Boxho rappelle qu'il "est impossible de trouver de l'ADN sur les ossements". En effet, l'ADN se trouvant "uniquement sur le revêtement cutané, il ne pénètre pas les tissus pour atteindre les segments osseux". Il n'est donc pas possible d'établir un lien entre la possible implication d'un tiers et une trace d'ADN.

Autre interrogation, les ossements ayant été découverts et ramenés aux enquêteurs par une randonneuse, la question est de savoir si cela a eu une incidence sur le bon déroulement de l'enquête.

À cette question, Philippe Boxho répond qu'il n'y a pas eu d'incidences "graves". Le seul problème, indique le médecin légiste, est qu'en le touchant, la randonneuse "a pu perdre des éléments car toutes les structures crâniennes ne sont pas nécessairement bien accrochées". L'expert rappelle également que la position de la tête au moment de la découverte est un élément important, d'où la nécessité pour les enquêteurs de prendre une photo quand ils sont appelés sur place.

L'objectif sera de déterminer scientifiquement si le corps se trouvait bien à cet endroit dès la disparition de l'enfant: "Quand vous avez un corps déposé, vous avez des éléments dans le sol qui permettent de savoir que le corps a séjourné un certain temps sur ce sol", a ainsi expliqué la porte-parole de la gendarmerie. Les anthropologues vont "essayer d'identifier si ces ossements étaient sur place ou s'ils ont pu être ramenés par une personne humaine, un animal, ou bien les conditions météo".

Article original publié sur BFMTV.com