"Il m’a dit que l’odeur de la litière avait imprégné les lieux" : mon proprio a-t-il le droit de m'interdire d'avoir un chien ou un chat ?

En France, un foyer sur deux déclare avoir au moins un animal de compagnie (Crédits : Getty Images/iStockphoto).

"Vous n’avez pas d’animaux ?" En entendant cette question, Héléna sent que l’appartement risque de lui passer sous le nez. La visite de ce logement à louer dans Biarritz se passe pourtant bien. Mais lorsque la jeune femme répond qu’elle a adopté un chaton l’été dernier, le propriétaire fait la grimace. Il explique qu’il a entièrement remis à neuf le logement après le passage d’un précédent locataire, apparemment négligent. "Il m’a dit que l’odeur de la litière du chat avait imprégné les lieux, et qu’il n’était pas très chaud de louer à nouveau à quelqu’un qui a un animal", se souvient Héléna. Le propriétaire l’informera ensuite que son dossier n’a pas été retenu, "sans dire pourquoi". Pourtant, un bailleur ne peut inconditionnellement interdire au locataire de vivre avec un animal de compagnie.

Propriétaire ou locataire : qui est responsable ?

En France, un ménage sur deux déclare posséder au moins un animal de compagnie, et c'est un droit qui ne peut être entravé par le bailleur. "Il ne peut pas interdire la détention d’animaux domestiques, en vertu de l’article 10 de la loi du 9 juillet 1970", rappelle Michel Veneau, président de l’Union Nationale des Locataires Indépendants (UNLI). Il n'est pas possible d'inscrire dans le bail une clause d’interdiction d’animal de compagnie, "elle serait considérée comme nulle et non avenue", précise-t-il.

Seule exception, les chiens d’attaque, dits de "première catégorie" (c'est-à-dire les races American Staffordshire terrier ou pitbull, Mastiff et Tosa), que le bailleur peut interdire. Sachez aussi que la jurisprudence peut être sévère à l'égard des animaux exotiques : la Cour d'appel de Colmar a par exemple validé en 1993 la résiliation du bail d'un locataire possédant un serpent, même en l'absence de troubles.

En revanche, les contrats de location saisonnière de meublés de tourisme peuvent comporter une clause interdisant la présence d'un animal de compagnie dans le logement.

De son côté, le locataire est responsable de son animal, qui ne doit entraîner "aucun dégât à l'immeuble ni aucun trouble de jouissance aux occupants de celui-ci", précise la loi. "Le locataire doit veiller à ce que son animal ne dérange pas les voisins et qu’il ne dégrade pas le logement", traduit Michel Veneau. Faute de quoi, le bailleur pourra vous en tenir responsable.

Quelles solutions ?

Si vous êtes à la recherche d’un logement et que vous pensez que votre dossier est écarté à cause de votre animal, il sera difficile de prouver que vous êtes discriminé sur ce critère. En revanche, il ne pourra pas vous être reproché de n’avoir pas dit à votre bailleur que vous possédez un animal de compagnie, puisque la loi vous autorise à en avoir un dans votre logement de location.

Si vous occupez déjà le logement, et que votre bailleur prétend vous interdire d’avoir un animal à votre domicile, ou bien que le règlement de la copropriété interdit les animaux dans les parties privées, rappelez-lui que la loi l’en empêche. Essayez de rassurer votre bailleur : dites-lui que vous savez que votre responsabilité peut être engagée, et que vous veillerez à ce que votre animal ne cause aucun trouble ni dommage dans le logement ou les parties communes.

Tant que votre animal, ou vos animaux, ne provoquent pas de troubles, et ne sont pas ni exotiques ni dangereux, vous n'avez a priori pas de souci à vous faire. Mais sachez que "le locataire peut être tenu responsable des nuisances olfactives et sonores causées par son animal", rappelle Michel Veneau, président de l’UNLI.

Les aboiements et les miaulements intempestifs ou les pipis dans la cour de l'immeuble peuvent donc être sanctionnés. Votre bailleur ou le syndic de copropriété peut vous le signaler par courrier dans un premier temps. Attention aussi aux éventuels dégâts dans le logement : lors de l'état des lieux de sortie, il faut que le logement soit dans le même état qu'à votre arrivée. Les traces de griffes de chat sur le papier peint, de pattes de chien sur les murs ou les éventuelles odeurs peuvent nécessiter quelques travaux de rafraîchissement aux frais du locataire.

Quels recours en cas de blocage ?

Si votre animal de compagnie est à l'origine de troubles "anormaux" du voisinage, votre bailleur peut enclencher une procédure judiciaire pour faire résilier le bail. Il devra prouver ces troubles, pas exemple à travers des témoignages de voisins ou des photos. Il pourra aussi payer un commissaire de justice pour qu'il vienne constater les troubles.

En cas de litige sur la question des troubles de jouissance ou des dégâts dans le logement, il est toujours préférable de saisir d'abord la commission départementale de conciliation. C'est gratuit, et cela permet de tenter d'abord une solution à l'amiable, dans un délai de deux mois en général. Toujours pour un accord amiable, vous avez le droit de faire appel au conciliateur de justice, via ce formulaire en ligne. En dernier recours, vous pourrez vous tourner vers le tribunal de proximité.