Mohamed Bouhafsi : "J’ai pleuré dans les bras de Basile Boli"

Quelle a été l’élément déclencheur de ce documentaire ?

Je suis toujours très attaché aux questions de société, à des sujets en fonction de ce qu'ils reflètent de notre monde et aussi de mes passions. Tout le monde sait que je viens du foot : qu'est-ce que dit le racisme dans le foot de notre société ? Tout est parti d'une discussion avec un très grand joueur de l'Équipe de France, dont je ne citerai pas le nom, qui m'a dit il y a quelques mois : "Quoi qu'il arrive dans un stade de foot, quand je marque, on oublie ma couleur de peau mais quand je perds, on me la rappelle toujours". Le fait qu’on ramène sans cesse ce joueur à sa race, ce n’est pas normal. J'ai senti dans la discussion son désarroi, son émotion, et son dépit. Je me suis dit que si des joueurs souffrent encore de ça en 2024, c’est qu’on n’a pas encore assez évolué. Ce qui m'a plu dans cette façon d’écrire et de tourner ce documentaire, c'est de donner la parole à ceux qui ont eu le regret de ne pas l'avoir prise à une certaine époque. Je veux que ce film puisse être vu par des plusieurs générations, c'est ce qui me passionne et qui m'anime.

Le témoignage de Basile Boli est sidérant…

Oui. Il dit : "Je regrette de pas avoir pris la parole parce que je n’avais pas assez de courage. Je me disais que ce n'était pas grave". Il y a aujourd’hui une libération de la parole dans toutes les sphères de la société et ça fait du bien. Je ne dis pas que ce film va soigner tous les maux mais j’espère qu’il aura le mérite de soigner le cœur de ces joueurs. Basile Boli m’a dit aussi : "Je me sens mieux depuis que j'ai fait ton doc, parce que j'ai libéré ma parole. Au moins maintenant, les gens peuvent savoir ce qu'on a vécu". Le poids de l'humiliation, c'est quelque chose qui m'a glacé chez Basile Boli. L'humiliation de ces bonhommes qui ont des carrières incroyables, des personnalités hors du commun…On sent même, à un moment donné, qu'ils s'affaissent physiquement sous le poids de la honte.

Dans quel état êtes-vous ressorti de ce tournage ?

En larmes. Je suis sorti éreinté, notamment de l’interview avec Basile. On s'est pris dans les bras et j'ai pleuré parce que je me suis dit : "Comment ce grand bonhomme, l'un des défenseurs les plus coriaces de France peut se cacher un homme humilié et blâmé, qui s'est senti dépassé par les événements".

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