Mise en place d'un pacte de défense européen

La France et l'Allemagne ont fait un pas important lundi vers l'intégration des politiques de défense en Europe - une ambition que les deux pays partagent depuis longtemps - avec la signature d'un pacte englobant 21 autres pays de l'Union européenne. /Photo d'archives/REUTERS/Hannibal Hanschke

par Robin Emmott

BRUXELLES (Reuters) - La France et l'Allemagne ont fait un pas important lundi vers l'intégration des politiques de défense en Europe - une ambition que les deux pays partagent depuis longtemps - avec la signature d'un pacte englobant 21 autres pays de l'Union européenne.

Ce pacte de "Coopération structurée permanente" (Pesco) vise à permettre le financement et la production de matériels militaires une fois que la Grande-Bretagne aura quitté l'UE, normalement en mars 2019. Le Royaume-Uni a toujours été réticent à l'idée de défense européenne.

La France et l'Allemagne espèrent renforcer ainsi la coopération militaire entre les Etats européens, tant sur les effectifs que sur les matériels, après des années de réductions budgétaires dans les programmes de défense et une tendance à se reposer sur la puissance américaine dans le cadre de l'Otan.

Le Pesco est le projet le plus ambitieux dans le domaine de la défense européenne depuis des décennies. Il incombera aux chefs d'Etat et de gouvernement de l'UE de l'entériner officiellement lors du Conseil européen du mois prochain.

"Aujourd'hui, nous avons franchi une étape historique", a dit à la presse le ministre allemand des Affaires étrangères, Sigmar Gabriel. "Il s'agit vraiment d'un événement clé dans la construction de l'Europe".

Mais des divergences sont apparues entre Paris et Berlin sur les obligations de chaque pays signataire du pacte, dit-on de source diplomatique.

La France souhaitait à l'origine la création d'un "noyau dur" de pays capables de financer et de faire vivre cette coopération militaire et veut affirmer la volonté de l'Union d'intervenir si nécessaire à l'étranger, sans passer par l'Otan ou l'Onu.

L'Allemagne est, elle, favorable à une assise la plus large possible, même si certains experts craignent que cela ne nuise à l'efficacité du Pesco, qui rassemble donc 23 pays.

SCEPTICISME DE L'OTAN

Outre la Grande-Bretagne, seuls quatre Etats membres ont choisi de rester hors du pacte : Danemark, Irlande, Malte et Portugal. L'Autriche, traditionnellement neutre, a accepté de s'y joindre à la dernière minute.

La mise en place de ce pacte de défense européen intervient quelques semaines après un discours clé d'Emmanuel Macron sur sa vision de l'Europe.

Fin septembre, le président français a plaidé en effet pour un approfondissement de l'Europe de la Défense passant par la constitution d'une "force commune d'intervention", d'un "budget de Défense commun" et d'"une doctrine commune pour agir".

"En matière de Défense, notre objectif doit être la capacité d'action autonome de l'Europe, en complément de l'Otan", a-t-il dit. "Au début de la prochaine décennie, l'Europe devra être ainsi dotée d'une force commune d'intervention, d'un budget de Défense commun et d'une doctrine commune pour agir."

Le Pesco pourrait notamment permettre la création d'un réseau de plates-formes logistiques en Europe, d'un centre de crise européen et la mise en place de formations communes pour les officiers. L'un des objectifs est en outre de réduire le nombre de systèmes d'armement en Europe afin de faire des économies et d'éviter les doublons.

Des responsables de l'Otan n'ont pas caché leur scepticisme sur ce pacte européen mais disent comprendre que l'UE veuille être en mesure de répondre à des crises humanitaires ou sécuritaires, notamment sur le continent africain.

(Gilles Trequesser avec Guy Kerivel pour le service français)