La minute antique : l’Europe vue par Jupiter

Le Viol d’Europe, de Petrus Paulus Rubens (1629).  - Credit:Bridgeman Images
Le Viol d’Europe, de Petrus Paulus Rubens (1629). - Credit:Bridgeman Images
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Pour qui s'intéresse à la mythologie, il y a un passage étonnant dans le discours sur l'Europe d'Emmanuel Macron à la Sorbonne : « L'Europe est une conversation qui ne se termine pas. Et c'est un projet, d'ailleurs, qui n'a pas de bornes. D'un point de vue philosophique, civilisationnel, c'est vrai. N'oublions jamais que le rapt d'Europe se fait sur des terres qu'on prétend asiatiques par un dieu grec. Il y a une forme d'ambiguïté, et c'est pour ça que ça ne se termine pas. »

Oui, étonnant. Parce que le « rapt » d'Europe, dans la mythologie, n'est pas ambigu du tout. C'est même, clairement, un viol. Europe est en effet cette princesse phénicienne – de l'actuel Liban, associé dans l'Antiquité à l'Asie – que Zeus désire et enlève en prenant l'apparence d'un taureau blanc.

À LIRE AUSSI La triple faute européenne de MacronArrivé en Crète – dans l'actuelle Europe, à laquelle la jeune fille donnera son nom –, le dieu grec reprend forme humaine, dénoue sa ceinture et, dixit le poète Nonnos de Panopolis, « cueille en silence le fruit sacré et mûr à peine ». Sous la métaphore, la brutalité sexuelle.

Alors le rapport avec « un projet qui n'a pas de bornes » – même si Zeus, carrément, les dépasse –, ou avec « une conversation qui ne se termine pas », désolé, on ne voit pas… Mais que ce mythe, rappelé par notre Jupiter à nous, nous serve au moins de leçon : rien que pour ce que notre Europe a enduré, on devrait être un peu plus indulgent avec elle.