Un million de déplacés, hôpitaux fermés... La plongée sans fin de Rafah dans l'horreur de la guerre

La Maison Blanche s'est dite "bouleversée", Emmanuel Macron a affirmé être "indigné", l'ONU a demandé une "enquête complète et transparente" à Israël. Lundi, tous les regards de la communauté internationale se sont tournés vers Rafah, où une frappe israélienne a causé la mort d'au moins 45 personnes et fait près de 250 blessés dans un camp de déplacés, d'après un bilan fourni par le ministère de la Santé du Hamas.

Ce mardi, les frappes israéliennes se poursuivaient dans cette ville du sud de la bande de Gaza et la Défense civile de Gaza a annoncé que l'une d'entre elles a tué 21 personnes dans un camp de déplacés, dans l'ouest de la ville. Dans un communiqué, l'armée israélienne a de son côté démenti avoir "frappé la zone humanitaire à Al-Mawasi".

Plusieurs témoins cités par l'AFP ont également affirmé que Tsahal avait déployé des tanks dans le centre de Rafah, théâtre depuis le début du mois d'une opération terrestre qui y a rendu la vie quotidienne presque impossible. "Rafah est devenu l'enfer sur Terre", a résumé lundi Philippe Lazzarini, le patron de l'UNRWA, l'Agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (objet de controverses ces derniers mois, NDLR).

Un millions de déplacés en trois semaines

Alors que plusieurs centaines de milliers de familles habitant à Gaza avaient trouvé refuge à Rafah depuis le début de la guerre il y a huit mois, la ville voit depuis début mai les Gazaouis quitter la ville en masse. Selon les derniers chiffres communiqués par l'UNRWA, environ un million de personnes ont fui Rafah au cours des trois semaines écoulées.

"Cela s’est produit alors qu’il n’y avait aucun endroit sûr où aller et au milieu des bombardements, du manque de nourriture et d’eau, des piles de déchets et des conditions de vie inadaptées", a souligné l'UNRWA sur son compte X.

La plupart des personnes quittant Rafah dans la précipitation ont déjà dû être déplacées à plusieurs reprises depuis le déclenchement de la guerre entre le Hamas et la bande de Gaza. Des journalistes de la radio NPR décrivent ainsi des familles s'en allant sur des routes boueuses, accompagnées de remorques, pleines de couvertures ou de bouteilles de gaz, et tirées par des ânes.

"Je n'ai pas les moyens d'évacuer une nouvelle fois"

Ceux qui restent à Rafah n'ont bien souvent pas le choix. Privés de salaires depuis des mois, la plupart des Palestiniens encore sur place n'ont pas l'argent nécessaire pour abandonner une fois de plus leur foyer provisoire. C'est par exemple le cas d'Aya Kafarna, une infirmière vivant dans une école de Rafah abandonnée. Elle a déjà été déplacée six fois en huit mois.

"Je n'ai pas les moyens d'évacuer une nouvelle fois. J'ai besoin d'un conteneur pour mettre mes affaires dedans, j'ai besoin d'au moins 1.800 shekels (environ 450 euros)", a-t-elle confié à NPR.

Un seul hôpital encore ouvert

Dans la ville soumise aux bombardements, malades et blessés n'ont plus l'assurance d'être soignés à l'hôpital. D'après un communiqué du ministère de la Santé du Hamas, un seul hôpital de la ville est encore à même d'accueillir des patients. Les quatre autres établissements de Rafah ne sont en revanche plus opérationnels.

Une situation témoignant plus largement des difficultés éprouvées par tous les hôpitaux de la bande de Gaza pour continuer à fonctionner et à soigner blessés et malades. L'Organisation mondiale de la Santé (OMS) estime qu'un tiers seulement des établissements situés dans le territoire sont encore partiellement fonctionnels et souffrent d'un manque d'équipements, de carburant et de nourriture.

Mardi, l'OMS a en outre déploré le fait que les évacuations médicales ont été complètement arrêtées dans toute la bande de Gaza depuis le début des bombardements israéliens sur Rafah. Ce qui signifie que davantage de personnes risquent de mourir dans l'attente de soins, a averti Margaret Harris, porte-parole de l'OMS.

Et dans le sens inverse, faire parvenir l'aide humanitaire jusqu'à Rafah représente un défi de taille pour l'UNRWA. La semaine dernière, l'Agence avait ainsi dû suspendre la distribution de nourriture dans la ville. Elle n'avait pas le choix, avait justifié Sam Rose, directeur de la planification de l'UNRWA à Rafah: "Cette décision a été prise parce que nous n'avons plus de stocks, Il ne nous restait plus rien dans nos entrepôts".

Article original publié sur BFMTV.com