"Michel Winock historien de sa propre histoire", la chronique de Bernard Pivot
Pourquoi l'excellent historien Michel Winock (Le Siècle des intellectuels, Clemenceau, prix Aujourd'hui, Madame de Staël, Goncourt de la biographie, etc.) raconte-t-il son enfance et son adolescence? Pas pour larmoyer ou plastronner. Pour continuer de faire de l'histoire. Né en 1937, donc âgé de 8 ans à la fin de la guerre, il a vécu ses Jours anciens à une époque qui mathématiquement n'est pas très éloignée de l'actuelle mais qui, si l'on y regarde de près, paraît relever quasiment de l'archéologie.
C'est que, par exemple, dans cette France libérée, victorieuse et qui attendra la fin de 1949 pour supprimer les tickets de rationnement du pain, on meurt de tuberculose. Elle a emporté Gaston Winock, le père de Michel, à l'âge de 49 ans, son frère aîné, Marcel, à 22 ans. "L'Église catholique et le parti communiste condamnent de concert le “contrôle des naissances”." Les méthodes de contraception figurent au rayon du bricolage. Si de Gaulle a accordé le droit de vote aux femmes, elles continuent d'avorter clandestinement. Elles vont devoir beaucoup lutter pour se libérer de la domination des hommes qui paraît encore biologiquement naturelle.
Michel Winock se définit comme "un enfant de la marge", du va-et-vient de la province, arrivé par hasard à Arcueil, dans la banlieue parisienne. Sa description de l'école primaire est minutieuse. Quelle mémoire! Mais c'est toute sa jeunesse qu'il raconte dans une débauche de détails où – je suis de deux ans l'aîné de l'écrivain,...