Des mesures "ni nécessaires ni proportionnées": la Défenseure des droits critique la loi "anti-squat"

Les associations l'attendaient. L'avis de la Défenseure des droits sur la proposition de loi "anti-squat", examinée cette semaine à l'Assemblée nationale, a été publié ce mardi. Il critique ce texte, qui vise à punir plus fortement les squatteurs et à réduire drastiquement les délais de justice.

"La Défenseure des droits considère que la réforme proposée ne parvient pas à garantir un équilibre entre les droits fondamentaux des occupants illicites et ceux des propriétaires et ouvre la voie à des détournements de procédure", écrit l'institution.

La Défenseure des droits estime également que "de nombreuses dispositions de la proposition de loi sont des atteintes disproportionnées et non nécessaires au coeur du droit au respect de la vie privée des occupants sans droit ni titre."

Renforcer les sanctions

Le texte défendu par Guillaume Kasbarian (Renaissance) propose de tripler les sanctions encourues par les squatteurs jusqu'à trois ans de prison et 45.000 euros d'amende au lieu d'actuellement un an d’emprisonnement et de 15.000 euros d’amende selon le premier alinéa de l’article 226‑4 du Code pénal.

La proposition de loi prévoit en retour la même peine pour ceux qui se font passer pour un propriétaire dans le but de louer un bien.

"Le renforcement de la pénalisation de l'occupation illicite ou l'assouplissement des procédures d'expulsion en raison de loyers impayés ne sont ni nécessaires ni proportionnés", écrit la Défenseure des droits, Claire Hédon.

Le texte réduit aussi la durée de la procédure judiciaire, et prévoit que certains délais pouvant être accordés par un juge ne soient désormais envisageables que si le locataire en fait lui-même la demande.

Les associations vent-debout

Même si la proposition de loi est critiquée, "cela ne signifie pas que le système actuel soit satisfaisant au regard des droits et des libertés", nuance la Défenseure des Droits dans son avis.

Plus tôt cette semaine, Attac condamnait une proposition de loi qui "criminalise les précaires".' L'association Droit au Logement (DAL) déployait des banderoles près de l'Assemblée lundi: "Se loger n'est pas un crime."

"On se trompe de cible. La France compte quatre millions de mal-logés, c'est la crise du logement qu'il faut venir combattre, pas ses victimes", dénonçait de son côté auprès de l'AFP Francis Vernede, directeur de la Fondation Abbé Pierre en Provence-Alpes-Côte d'Azur.

Publié dans l'après-midi alors que les parlementaires discutaient du texte, l'avis de la Défenseure des droits s'est frayé un chemin jusque dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale.

"J'espère que les avis de la Défenseure des droits dans ce pays compte encore", a lancé la présidente des députés LFI Mathilde Panot, opposée au texte. Les débats autour de la proposition de loi, qui divise jusqu'au sein de la majorité, se termineront cette semaine.

Article original publié sur BFMTV.com