Mediapro condamné aux prud'hommes face à des journalistes pigistes

Plus de trois ans après l'arrêt retentissant de sa chaîne qui diffusait la Ligue 1 et la Ligue 2, Mediapro a subi une lourde défaite devant la justice française. Le groupe audiovisuel a été condamné fin avril par le conseil des prud'hommes de Bobigny face à 35 salariés pigistes, pour la plupart journalistes. Ces derniers ont obtenu la requalification de leur contrat en CDI, des indemnités de licenciement et des dommages-intérets. Le montant total des condamnations s'élève à 338.357 euros, selon Me Olivier Khatchikian, qui a représenté les plaignants.

La chaîne Téléfoot, montée par Mediapro, s'était arrêtée en février 2021 après le refus de sa société mère d'honorer l'intégralité de son contrat de droits TV conclu avec la Ligue de football professionnel (LFP). Placée en liquidation judiciaire au mois d'octobre, la société avait alors procédé à des licenciements pour motif économique en ce qui concerne ses salariés en CDI. Mais pour les pigistes, la collaboration s'était brutalement arrêtée et n'avait donné lieu à aucune compensation.

Pas de contrats écrits

Mais les plaignants ont fait valoir qu'ils n'avaient signé aucun contrat à l'occasion de leurs collaborations ponctuelles. Or, quand aucun écrit n'est transmis par l'employeur à son salarié dans un délai de deux jours ouvrables, un contrat est "réputé conclu pour une durée indéterminée". Ce que le conseil des prud'hommes a convenu, bien que Mediapro se soit défendu en expliquant avoir été mis en difficulté sur le plan organisationnel par la pandémie de Covid-19. Les mandataires de la société ont notamment expliqué qu'il manquait un service de Ressources humaines au début de l'activité.

Cette première décision des juges a entraîné les suivantes, en ouvrant droit à des indemnités de requalification et de licenciement sans cause réelle et sérieuse. En principe, ces pigistes auraient dû être concernés par un licenciement économique et par conséquent bénéficier des conditions du plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) mis en place par Mediapro. Les procédures n'ayant pas été respectées, des dommages-intérêts ont été fixés pour la perte de ces opportunités liées au PSE (le plan incluait un congé rémunéré de reclassement de neuf à douze mois et des financements de formation). Le calcul de ce dédommagement supplémentaire tient compte d'indemnités confidentielles que des salariés en CDI ont pu conclure avec Mediapro dans le cadre de leur licenciement économique.

Le fiasco Mediapro avait provoqué une immense crise au sein du football français, qui avait vendu 80% des droits TV de la Ligue 1 et de la Ligue 2 au groupe sino-espagnol pour 800 millions d'euros annuels sur la période 2020-2024. Les lots abandonnés avaient été rachetés à prix cassés par Canal+ et Amazon.

Article original publié sur RMC Sport