Mathieu Kassovitz diffuse son documentaire sur le cannabis à l’Assemblée : « La répression n’a jamais marché »

Invité à l’Assemblée Nationale, Mathieu Kassovitz diffusera devant les députés son documentaire sur le cannabis. Il espère enclencher un débat sur sa légalisation en France. ENTRETIEN/

CANNABIS - Un documentaire pour faire avancer le débat ? C’est en tout cas l’idée qu’a derrière la tête l’acteur Mathieu Kassovitz, coréalisateur - avec Antoine Robin - d’un documentaire intitulé Cannabis diffusé par France 5 en avril dernier. Il y fait le point sur la situation dans les pays où cette drogue est dépénalisée, en partie ou totalement légalisée.

Le cannabis a également fait la Une de l’actualité ces derniers mois, et ce pour plusieurs raisons. En France, sa vente, sa détention et son usage sont sévèrement réprimés, et le gouvernement entend intensifier sa lutte contre le trafic, comme en témoignent les récentes opérations anti drogue… Alors qu’en Allemagne, le cannabis a été récemment légalisé, avec un strict encadrement.

C’est dans ce contexte que Mathieu Kassovitz diffusera son documentaire à l’Assemblée Nationale, le 12 juin prochain, sur l’invitation de Christophe Bex, député LFI de Haute-Garonne, et président d’un groupe d’études dédié au cannabis. Le HuffPost a demandé à Mathieu Kassovitz ce qu’il attend de cette diffusion, qui sera suivie d’un débat.

Mathieu Kassovitz. Les choses ont énormément changé ces cinq dernières années au sujet de la légalisation du cannabis. On a donc voulu faire le point sur ce qui marche et ce qui ne marche pas dans les pays qui ont décidé de sauter le pas. Ce sont les députés qui nous ont appelés pour qu’on montre le film. Notre but est de créer au moins une discussion sur le sujet. Si, à la fin, on décide de ne pas légaliser, très bien. Mais au moins, il y aura eu une discussion.

J’aimerais que les députés arrêtent de regarder ailleurs et acceptent la réalité. Il y a six millions de fumeurs quotidiens en France [cinq millions en 2022, selon l’Observatoire français des drogues et tendances addictives] et le produit est accessible partout. C’est une économie parallèle et criminelle qui pourrait être mieux contrôlée.

Je ne pense pas qu’on puisse faire changer d’avis un politicien qui suit sa ligne politique. Ce qu’on peut changer, en revanche, c’est l’avis des gens qui votent pour eux. Il faut qu’il y ait un débat pour que les citoyens soient informés. En parlant avec les gens, on voit bien que certains ne savent pas ce qu’est le cannabis, ce qu’est le produit en lui-même et ne connaissent pas sa dangerosité. On vit sur des fantasmes. D’autant plus que la légalisation présente des avantages pour la santé et la sécurité.

J’applaudirais avec quatre mains si le résultat était probant, et qu’il n’y avait tout d’un coup plus de drogue en France. Mais la répression n’a jamais marché et ne marchera jamais, parce qu’on est dans un système économique très simple : tant qu’il y aura de la demande, il y aura de l’offre. Ils ne peuvent pas gagner en tapant sur les doigts des gens. D’autant plus qu’on a maintenant des études sur le produit, et qu’on sait exactement ce qu’il est, il faudrait arrêter de penser que c’est la petite fumée du diable qui rend les gens fous.

Le Quebec, car ils ont un contrôle de A à Z de la production. Ils ont mis en place une industrie qui n’est pas faite pour être rentable mais pour remplir les caisses de l’État et de la santé. De toute façon, quoi qu’il se passe, les gens fumeront toujours. Penser qu’il y aura plus de fumeurs si on légalise est faux. Au contraire, les études qui sont faites dans les pays qui ont légalisé montrent que les gens sont de moins en moins intéressés par le produit. Il n’y a pas plus de criminalité, pas plus de problèmes de santé, pas plus d’accidents de voiture, et pas plus de fumeurs qu’avant. En fait, il n’y a pas de problèmes quand on légalise.

[Précision du HuffPost : au Canada, le taux de consommation a légèrement augmenté entre 2018, date de la légalisation, et 2023, passant de 22 % à 26 % de la population totale ayant consommé du cannabis dans les 12 derniers mois ; source : Infobase Santé du gouvernement canadien.]

À titre personnel, êtes-vous favorable à la légalisation du cannabis ?

Je pense qu’il faut légaliser. Ça devient absurde dans le monde dans lequel on vit de ne pas être progressiste comme le reste du monde sur ce sujet, et de fermer les yeux sur un problème qui est là et qui va devenir de plus en plus grave. On a accès à ces produits de l’autre côté de nos frontières, comme en Allemagne, et ils vont être de plus en plus autorisés.

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