Marlène Schiappa annonce que 140.000 personnes sont sous l'emprise de dérives sectaires en France

Environ 500 groupes de dérives sectaires ont été dénombrés en France, dévoile la ministre déléguée dans une interview à L'Obs ce mercredi. Les théories de médecines alternatives suscitent notamment l'inquiétude.

C'est un nouvel éclairage apporté sur les dérives sectaires en France. Alors que traditionnellement, on attribuait à ce phénomène des communautés de grandes ampleurs, telle que l'Eglise de la Scientologie, il s'agit désormais de "beaucoup de petits groupes". Dans ces derniers sont enrôlés quelque 140.000 Français, dont une majorité de mineurs, révèle ce mercredi Marlène Schiappa dans les colonnes de L'Obs.

La ministre déléguée à la Citoyenneté y présente les conclusions d'un travail d'enquête des forces de l'ordre et de la Mission interministérielle de Vigilance et de Lutte contre les Dérives sectaires (Miviludes), désormais rattachée à l'Intérieur.

3000 signalements en 2020

Les chiffres parlent d'eux-mêmes: 500 groupes présentant une emprise sectaire ont été dénombrés en France, soit "140.000 personnes dont 90.000 enfants et adolescents." Lors de l'année écoulée, 3000 signalements ont été envoyés aux agents de la Miviludes, "dont 700 ont été évalués comme sérieux", poursuit la ministre.

Pour rappel, une dérive sectaire se caractérise "par la mise en œuvre, par un groupe organisé ou un individu isolé, quelle que soit sa nature ou son activité, de pressions ou de techniques ayant pour but de créer, de maintenir ou d’exploiter chez une personne un état de sujétion psychologique ou physique, la privant d’une partie de son libre arbitre, avec des conséquences dommageables pour cette personne, son entourage ou pour la société."

Marlène Schiappa indique que "cela concerne toutes les classes sociales", mais plus particulièrement les femmes "souvent en situation de précarité ou victimes de prédations sexuelles". Sur le territoire, il existe une "surreprésentation" de ces dérives dans les "départements ruraux":

"Quand il y a moins de services publics, quand on est dans un désert médical, on se tourne plus facilement vers des offres alternatives pour se soigner", note la ministre.

Le crudivoriste Thierry Casasnovas dans le viseur

Le domaine de la santé voit en effet attirer de plus en plus de gourous en tout genre. Parmi les signalements recensés en 2020, "40 % concernent des questions de santé, de bien-être ou de médecine alternative; 25 %, des mouvements religieux, avec un regain des courants apocalyptiques." L'une des personnalités particulièrement pointée du doigt est un adepte du jeûne et du crudivorisme, Thierry Casasnovas.

Comme nous vous en parlions en octobre, cet homme partage depuis bientôt une décennie des vidéos sur YouTube dans lesquelles il prodigue des soi-disant conseils de santé. Il encourage notamment à baser son alimentation sur des jus de légumes et de fruits crus et des périodes de jeûne, affirmant que "la maladie n'existe pas". "Il y a des symptômes", que l'on peut combattre, selon lui, sans traitements médicaux. Une enquête a été ouverte cet été par le parquet de Paris pour "mise en danger de la vie d'autrui".

La ministre évoque également le développement de "stages survivalistes", axés autour de "l’effondrement imminent de la planète". Frédérik L., qui a tué trois gendarmes en décembre dernier dans le Puy-de-Dôme était un partisan de cette mouvance.

Le Covid-19, un terrain propice

La pandémie due Covid-19 est évidemment aussi un terrain propice au développement des dérives sectaires. "C’est une période de quête de sens, explique Marlène Schiappa. On a vu des gourous expliquer que la 5G serait à l’origine du virus et qu’il faut refuser la vaccination." Une vingtaine d'enquêtes sont en cours en France sur des personnes soupçonnées d'avoir "profité de cette crise pour développer en France une emprise sectaire."

Dans l'actualité également, la ministre confirme le développement de la mouvance complotiste QAnon en France, sans toutefois apporter de chiffres précis. Le Figaro avançait la semaine dernière "une quinzaine de signalements et témoignages" concernant cette galaxie pro-Trump ayant participé à l'intrusion dans le capitole en janvier.

Face à ce développement protéiforme, Marlène Schiappa nie un quelconque désengagement de l'Etat contre les dérives sectaires. Bien que le rattachement de la Milviludes au ministère de l'Intérieur ait suscité de nombreuses inquiétudes, elle assure que c'est un sujet "prioritaire pour nous". Preuve en est, après deux ans sans présidence, la magistrate Hanène Romdhane va prendre la tête de l'institution.

Article original publié sur BFMTV.com

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