Marc Levy : « Une armoire à glace m’a attrapé en pleine rue »

J’ai eu la chance à 25 ans d’aller travailler quelque temps dans les Laurentides ; c’est une région ravissante à une heure de route de Montréal. Je dormais alors dans un petit chalet en amont du village de Morin Heights. Au premier matin, j’ouvrais mes fenêtres sur un sublime hiver de carte postale, ciel bleu et étendues blanches à perte d’horizon. Vite habillé, me voilà déambulant sur l’une des passerelles en bois qui rehaussaient alors les trottoirs de la ville au-dessus du niveau de la neige.

Face à moi, un gars qui doit peser ses 100 kilos pour 1,95 mètre marche d’un pas plus que déterminé dans ma direction. Le trottoir n’est pas bien large, mais avec un peu de civilité on doit pouvoir se croiser sans se bagarrer. A le voir accélérer sourcils froncés, il ne doit pas partager mon avis et, compte tenu de notre différence de gabarit, je me prépare à passer un sale moment. Le voilà à ma hauteur, j’essaie de calmer le claquement de ma mâchoire pour l’assurer de mon intention de lui céder le passage, mais ce dernier m’empoigne par le bras et m’entraîne de force à l’intérieur du premier magasin à notre hauteur.

Une fois dans la boutique, je ne comprends rien, j’angoisse à mort. La vendeuse, pas plus affolée que cela, ne relève même pas la tête de son journal. «Vous n’êtes pas d’ici ? » m’aboie mon agresseur potentiel. Je ­bafouille un « non » tout en me préparant au pire. « Je m’en doutais », dit-il. Et, la voix grave, il m’explique que la sécheresse de l’air ­empêche de re...


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