Marc Lambron, les souliers de Juliette Gréco et les nus de Jane Birkin

Ce qui frappe dans tous les entretiens menés par Marc Lambron au cours de sa carrière d’intervieweur, c’est le travail, évident, qui les a précédés.  - Credit:JF PAGA/ÉDITIONS GRASSET/SP
Ce qui frappe dans tous les entretiens menés par Marc Lambron au cours de sa carrière d’intervieweur, c’est le travail, évident, qui les a précédés. - Credit:JF PAGA/ÉDITIONS GRASSET/SP

Raymond Devos, logé dans une chambre minuscule, se cogne la tête, chaque matin, au lavabo sous lequel il dort. Juliette Gréco, sans argent, traverse Paris des chaussures en raphia aux pieds. Tiens, Pierre Brasseur, au restaurant, se renverse son plat de spaghettis sur le crâne : une emmerdeuse vient de l'apostropher, « Monsieur Brasseur, comment joueriez-vous Molière ? », « Comme ça, Madame, avec une perruque », répond le comédien. Et puis voilà Jane Birkin courant au musée du Louvre, curieuse de découvrir les nus du peintre Lucas Cranach, que Gainsbourg, amoureux, trouve si semblables à son corps androgyne…

Toutes ces scènes sont tirées des entretiens que l'écrivain Marc Lambron, notre camarade du Point, a réalisés avec des artistes – peintres, chanteurs, comédiens –, entretiens rassemblés pour la première fois et qu'il faut lire d'une traite, comme on se passerait en accéléré le film choral d'une époque. Un film jamais voyeur mais plein d'instantanés tendres, inédits, un film qui dévoile, en quelques répliques, la vérité profonde de chacun de ces personnages publics que l'on croyait connaître.

Du travail

Souvent minutée, accordée la plupart du temps dans un cadre promotionnel, l'interview d'artiste est pourtant, tous les journalistes le savent, un exercice archiconventionnel dont il est difficile de tirer une matière vivante. Et lorsque l'intervieweur est lui-même écrivain, l'échange peut alors vite tourner à un entre-soi plein de fatuité, creux, sans le mo [...] Lire la suite