Manuel Valls s'efforce de sauver la conférence sociale

Le Premier ministre, Manuel Valls, promet dans une interview publiée mercredi par Les Echos d'aménager ou d'étaler dans le temps des mesures critiquées par les organisations patronales, qui ont menacé de boycotter la conférence sociale des 7 et 8 juillet. /Photo prise le 26 mai 2014/REUTERS/Philippe Wojazer

par Emmanuel Jarry PARIS (Reuters) - Le Premier ministre promet dans une interview publiée mercredi par Les Echos d'aménager ou d'étaler dans le temps des mesures critiquées par les organisations patronales, qui ont menacé de boycotter la conférence sociale des 7 et 8 juillet. Manuel Valls annonce notamment un report partiel de la mise en oeuvre du compte personnel de prévention de la pénibilité dans laquelle le Medef, la CGPME et l'Union professionnelle artisanale (UPA) voient une contrainte insupportable pour les entreprises. Selon la CGPME et l'UPA, dont les présidents ont eu mardi une réunion avec leur homologue du Medef, Pierre Gattaz, pour arrêter une attitude commune, le Premier ministre doit confirmer mercredi par lettre des engagements verbaux. Sans attendre, Pierre Gattaz a salué sur son compte Twitter un "discours encourageant" et "des avancées à regarder". Dans un commentaire envoyé à Reuters, le secrétaire général de la CGPME, Jean-Eudes du Mesnil, fait état d'une "véritable avancée" sur la pénibilité et les modalités des contrats de travail à temps partiel, autre pomme de discorde. Manuel Valls constate dans Les Echos "une véritable focalisation" sur le mécanisme anti-pénibilité et dit ne pas vouloir que cela "cristallise les tensions". Il annonce qu'il demandera aux ministres du Travail et des Affaires sociales, François Rebsamen et Marisol Touraine, de réviser les projets de décrets "pour aller plus loin dans la simplification et la sécurisation du dispositif". Ce dispositif devait initialement entrer en vigueur au 1er janvier 2015. Finalement, "l’année 2015 sera une année de montée en charge progressive : les facteurs de pénibilité les plus simples à mesurer seront pris en compte et moins d’un million de salariés seront concernés", précise le Premier ministre. SURENCHÈRE ET ATTENTISME "Cela facilitera une mise en œuvre plus souple dans des secteurs tels que le bâtiment. L’objectif est d’aboutir à une généralisation en 2016, dans les meilleures conditions." Le gouvernement complètera par ailleurs la législation sur le temps partiel pour "écarter tout risque juridique quand des contrats de moins de 24 heures par semaine sont établis avec l’accord individuel du salarié", ajoute-t-il. Ce seuil de 24 heures est entré en vigueur lundi. Manuel Valls s'engage également à donner "une visibilité complète" aux employeurs en matière de baisse du coût du travail et de fiscalité des entreprises - autre revendication du Medef. "Après avoir diminué de 6,5 milliards d'euros dès 2015, les prélèvements sur les entreprises seront réduits de 8 milliards en 2016 et d'environ 5,5 milliards en 2017", rappelle-t-il. A cela s'ajoutera la montée en charge du crédit d'impôt compétitivité (Cice) à hauteur de 20 milliards d'euros. Mais ces engagements "devront être réciproques", prévient Manuel Valls. "Le patronat ne peut pas être dans la surenchère permanente et dans l'attentisme." Il reproche au Medef, première organisation patronale française, "d'ignorer les efforts énormes" du gouvernement et estime que "boycotter la conférence sociale serait un acte incompréhensible", car "on ne peut pas se plaindre de trop d'Etat et déserter le dialogue social." La CGPME a été la première à s'interroger sur sa présence à la conférence sociale si le gouvernement ne revenait pas sur le mécanisme anti-pénibilité et le seuil de 24 heures par semaine. Le Medef a aussi brandi la menace d'un boycott. Dans un article publié sur son blog, Pierre Gattaz pèse le pour et le contre. Pour annoncer finalement, histoire de faire durer le suspense : "Réponse vendredi après-midi." POLITIQUE "BIEN CALIBRÉE" Selon Jean-Eudes du Mesnil, la CGPME annoncera mercredi si elle participe ou non à la conférence, après examen de la lettre du Premier ministre. Le président de l'UPA a aussi déclaré à Reuters que son organisation ferait une "lecture attentive" du courrier de Manuel Valls. Mais contrairement à la CGPME et au Medef, l'UPA n'avait pas menacé explicitement d'un boycott. Manuel Valls annonce que les freins au développement de l'apprentissage seront un des sujets de la conférence sociale et se dit prêt à réexaminer les dispositifs d'aide, "à condition que les entreprises s'engagent sur des objectifs chiffrés". Et il confirme sa volonté de demander au patronat et aux syndicats d'engager des discussions sur les seuils sociaux - le nombre de salariés au-delà duquel l'entreprise est soumise à de nouvelles contraintes - et la simplification du Code du travail, deux autres revendications patronales. Au risque de se voir de nouveau reprocher, notamment par l'aile gauche du Parti socialiste au pouvoir et des syndicats comme la CGT, de privilégier les entreprises. Des critiques auxquelles il répond par avance : "Je veux sortir la France de ses blocages." "Notre politique est bien calibrée (...) Nos difficultés viennent avant tout d'un manque de compétitivité de nos entreprises" fait-il valoir, tout en promettant des baisses d'impôts pour les ménages d'ici 2017. (Edité par Sophie Louet)