Manque de temps, oubli ou choix : un Français sur 6 pas inscrit sur la liste électorale de sa commune en 2022

La "mal-inscription" sur les listes électorales est un facteur d'abstention, soulignent les spécialistes.

Un Français sur 6 (16,5%) enregistrés sur les listes électorales n'était pas inscrit dans la commune où il résidait lors de l'élection présidentielle de 2022, a annoncé l'Insee dans un rapport publié ce mercredi 5 mars.

Cette situation, qui concerne 7,7 millions de personnes au total, est particulièrement fréquente chez les jeunes de 18 à 25 ans: 39% d'entre eux étaient inscrits ailleurs que là où ils habitaient, généralement dans la commune de leurs parents, précise l'Insee.

Même chose pour la moitié des Français qui ont déménagé dans l'année et les trois quarts de ceux vivant en communauté, comme en maison de retraite ou en caserne.

Un facteur d'abstention

"Les motivations de cette absence de réinscription dans la nouvelle commune peuvent être diverses : manque de temps, oubli ou choix délibéré", explique l'Insee.

Lors de l'élection présidentielle de 2022, 47 millions de Français sur les 49,9 millions majeurs étaient inscrits sur les listes électorales. Mais seuls 35,9 millions d'entre eux (73%) avaient voté au premier tour, une participation au plus bas depuis 2002.

"Sur un scrutin présidentiel, le plus mobilisateur, la mal-inscription est l'un des facteurs les plus puissants d'abstention" explique à l'AFP Cécile Braconnier, professeur de sciences politiques et directrice de Sciences-Po Saint-Germain-en-Laye.

"Les chances de s'abstenir sont multipliées par 2,5 du fait de la situation de mal-inscription", a établi cette spécialiste de l'abstention.

Faciliter la procuration ?

Les prochaines élections en France, les européennes le 9 juin, sont habituellement marquées par une participation médiocre : seul 1 Français inscrit sur 2 s'était rendu aux urnes lors des précédentes élections en 2019.

"La mal-inscription joue proportionnellement moins dans ces élections moins mobilisatrices, mais il reste un obstacle supplémentaire à la participation électorale", estime Cécile Braconnier.

Les Français non-inscrits dans leur commune principale ne sont, pour la plupart d'entre eux, pas très éloignés de leur bureau de vote : la moitié y réside à moins de 21 kilomètres. Mais même une distance relativement faible "constitue un obstacle qui peut être rédhibitoire chez des populations qui sont peu politisées" explique Cécile Braconnier.

Exception notable parmi ces électeurs non inscrits dans leur commune de résidence: les Parisiens, qui doivent voter en moyenne à 239 kilomètres de la capitale, a chiffré l'Insee à partir de l'enquête de recensement de 2022 croisée avec le répertoire électoral.

Pour le professeur de sciences politiques de l'université de Montpellier Jean-Yves Dormagen, faciliter la procédure de procuration pourrait être une voie pour minorer l'effet de la mal-inscription sur l'abstention.

"En 2024, qu'il faille encore faire une procuration papier au tribunal d'instance ou au commissariat de police à l'ère de l'informatique, c'est quand même un peu difficile", juge ainsi Jean-Yves Dormagen, co-auteur avec Cécile Braconnier d'une étude sur la mal-inscription.

Article original publié sur BFMTV.com

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