Manifestations, écoles incendiées: un dispositif d'éducation à la sexualité fait polémique en Belgique

Manifestations, écoles incendiées: un dispositif d'éducation à la sexualité fait polémique en Belgique

Depuis début septembre, une partie de la Belgique fait face à une polémique concernant des cours d'éducation à la sexualité (entre autres). Cette tension a déjà de graves répercussions. Selon la RTBF, six écoles de la région de Charleroi ont été touchées par des incendies la semaine dernière. Dans au moins quatre d'entre elles, des inscriptions anti-Evras (Éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle, NDLR) ont été découvertes, d'après le procureur de la ville, Vincent Fiasse, qui a ouvert une enquête. Ce dimanche, une manifestation anti-Evras a réuni 1500 personnes à Bruxelles, selon les médias belges.

L'Evras est notamment une "animation" de deux heures par an pour deux classes d'âge destinée à répondre aux questions des élèves sur les sujets en question. Depuis la rentrée scolaire 2023, son déploiement doit être systématisé dans les établissements de la Wallonie, une région francophone du sud de la Belgique.

Polémique et fausses informations

Sur les réseaux sociaux, ce programme suscite une importante polémique, accompagnée de fausses informations alimentées par différentes personnes et entités, comme le relève la RTBF.

Certains affirment ainsi que des élèves de maternelle recevront des cours d'éducation sexuelle, ou même que le programme fait l'apologie de la pédophilie. Le président du mouvement catholique intégriste Civitas, Alain Escada, a aussi pris la parole lors de la manifestation de samedi à Bruxelles pour dénoncer un "plan mondial promu par l'OMS pour installer un nouvel ordre mondial sexuel pervertissant les enfants", selon ses déclarations sur X (ex-Twitter).

Beaucoup relaient également des extraits du "guide" de l'Evras, qu'ils jugent inappropriés, comme celui mentionnant le fait de "reconnaître que certaines personnes ont une identité de genre différente du genre assigné à la naissance et basé sur le sexe biologique" dans un repère correspondant aux 5-8 ans.

Des cours obligatoires à partir de 11 ans

Mais, dès son introduction, il est précisé que ce document "n’est pas destiné à être distribué aux enfants et aux jeunes" et qu'il "s’adresse aux acteurs et actrices qui encadrent des activités Evras".

"Il ne constitue pas non plus un programme pour les élèves: il constitue encore moins un mode d’emploi qui indique qu’il faille évoquer telle thématique à tel âge", appuie le programme sur son site. L'objectif du guide est "d’informer les professionnel.les sur les questionnements qui peuvent apparaître - ou pas - à partir de tel âge, et de les outiller en fonction de l’âge", est-il aussi expliqué.

Les animations Evras imposées ne concernent par ailleurs que les élèves du sixième niveau de primaire (11-12 ans) et ceux du quatrième niveau de secondaire (15-16 ans). Obligatoires depuis 2012, ils n'étaient jusque-là pas systématiquement assurés faute de moyens.

Une "campagne de désinformation"

Caroline Désir, la ministre francophone de l'Éducation, a dénoncé "une campagne de désinformation" destinée selon elle à "attiser la suspicion" et "faire peur aux parents".

"On ne va évidemment pas encourager une hyper-sexualisation chez les jeunes, ni susciter une orientation sexuelle ou une identité de genre. J'ai lu qu'on allait 'apprendre aux enfants à se masturber', c'est complètement inadmissible de faire peur aux parents sur ce sujet", a déclaré Caroline Désir début septembre à la radio La Première (RTBF).

La ministre de l'Intérieur, Annelies Verlinden, a annoncé vendredi avoir demandé à la police fédérale de venir en aide aux forces de l'ordre locales afin de protéger les établissements scolaires.

Le sujet est arrivé en France

Le sujet a dépassé les frontières belges et désormais, certains assurent que le dispositif Evras concerne la France. Partageant une pétition destinée aux Français, le rappeur Rohff a par exemple appelé sur X (ex-Twitter) à refuser qu'on "enseigne la pénétration et la pornographie à 9 ans comme l’indique la loi Evras qu’ils veulent faire passer en douce".

Une "loi" Evras n'existe pas, ni en France, ni en Belgique où le dispositif s'appuie sur un décret. Par ailleurs, son objectif n'est pas d'"enseigner pénétration et la pornographie à 9 ans", mais de répondre aux questions que des élèves peuvent avoir sur ces sujets.

"On ne va jamais susciter ou anticiper une question. On part du ressenti, du questionnement des élèves pour aborder une thématique avec eux", a affirmé le 7 septembre sur la RTBF la ministre Caroline Désir.

En France, la mise en œuvre d'une éducation à la sexualité est une obligation dans le primaire et dans le secondaire. Elle "contribue à l'apprentissage d'un comportement responsable, dans le respect de soi et des autres", en abordant les questions de consentement ou de contraception par exemple, explique le ministère de l'Éducation nationale sur son site. En septembre 2022, Pap Ndiaye, alors ministre de l'Éducation nationale, reconnaissait toutefois que "de grandes disparités persistent entre les établissements" dans le respect de cette obligation.

Article original publié sur BFMTV.com