Manifestation syndicale pour influer sur le "grand débat"

PARIS (Reuters) - La CGT, Force ouvrière, Solidaires, la FSU et les syndicats étudiants Unef et UNL ont manifesté mardi pour réclamer un tournant dans la politique sociale d'Emmanuel Macron, alors que les propositions de réformes pour répondre à la crise des "Gilets jaunes" sont attendues dans les prochaines semaines.

Entre 130 et 150 manifestations étaient prévues sur le territoire, selon la CGT, afin de "gagner l’augmentation des salaires, des pensions et des minima sociaux, l’égalité femmes-hommes et un véritable droit à l’éducation et à la formation".

Des préavis de grève ont été déposés dans la Fonction publique, notamment dans l'Education nationale, dans les transports urbains ou encore le ramassage des déchets. Des blocages sont également prévus.

Il s'agit de la première manifestation interprofessionnelle à laquelle Force ouvrière participe depuis le 9 octobre.

Près de 12.000 personnes ont défilé dans le calme à Paris, selon la préfecture de police, soit 6.000 de moins que le 5 février, dernier appel à manifester de la CGT auquel s'étaient joint des "Gilets jaunes".

Les syndicats ont compté 50.000 participants dans la capitale, contre 35.000 un mois plus tôt, et 350.000 dans toute la France, Paris compris.

A Marseille, ils étaient 58.000 selon les organisateurs et 5.000 selon la police. A Bordeaux, la préfecture a compté 4.200 manifestants et les syndicats 15.000.

NE PAS RESTER "MUETS"

A la mi-journée, l'Education nationale a comptabilisé en moyenne 13,55% de grévistes toutes catégories confondues dont un taux de 16,09% chez les enseignants. Chez Pôle Emploi, le taux de participation à la grève était de 9,07%.

Pour le secrétaire général de FO, Yves Veyrier, "les syndicats ne pouvaient pas (...) rester spectateurs, muets, dans le contexte actuel et, a fortiori, au sortir du grand débat".

Le "grand débat national", mis en place en réponse à la crise des "Gilets jaunes", est entré dans sa dernière ligne droite cette semaine avant l'annonce, de la mi-avril à l'été, des propositions de l'exécutif.

"Maintenant il faut des réponses", a déclaré dans le cortège parisien le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez. "On attend les réponses en matière de salaires, de justice fiscale, de services publics, d'industrie, d'environnement."

Yves Veyrier a abondé dans le même sens.

"On a été reçus à L'Elysée le 10 décembre, on a été reçus à Matignon à plusieurs reprises (...) mais les réponses données n'ont pas éteint la contestation et ne répondaient pas à ce qui nous paraissait nécessaire, sur la question des salaires en particulier", a-t-il expliqué.

Parmi les manifestants, de nombreux fonctionnaires. Les syndicats ont massivement rejeté vendredi le projet de réforme de la Fonction publique qui leur a été présenté au conseil commun de la Fonction publique.

SYNDICATS EN ORDRE DISPERSÉS

"Ils sont en train de détruire les services publics", a dit Sandra Demarcq, de Solidaires Finances publiques, qui dénonce les suppressions d'effectifs du fisc dans les départements. L'Etat a annoncé la suppression de 120.000 postes de fonctionnaires sur le quinquennat.

Des enseignants, dont des stylos rouges, un groupe formé sur Facebook qui se dit "détaché de toute appartenance politique et syndicale", à l'image des "Gilets jaunes", ont également pris part aux cortèges, pour dénoncer la réforme de l'Education nationale actuellement au Parlement.

Les syndicats sont divisés sur la stratégie à adopter pour peser sur l'exécutif.

La CFDT a présenté début mars ses 66 propositions élaborées avec 18 autres associations, ONG et syndicats pour "allier justice sociale, lutte contre les inégalités et transition écologique", appelant notamment l'exécutif à impliquer davantage les corps intermédiaires dans ses décisions.

"Ce qui m'intéresse c'est d'obtenir des résultats concrets; Je ne crois pas que quelque chose de confus, dont on ne sait pas vraiment quel est le mot d'ordre, soit de nature à obtenir des résultats", a dit mardi Laurent Berger sur France Culture.

Le co-délégué général de Solidaires, Eric Beynel, à l'inverse, estime que les mobilisations "manquent de dynamisme". Il appelle à une "vraie stratégie" et un "vrai calendrier" pour faire converger les mobilisations des "Gilets jaunes", des syndicats et les manifestations pour le climat, que "rien n'oppose sur le fond".

(Caroline Pailliez, édité par Yves Clarisse)