Macron en Irlande pour consolider ses liens avec Dublin

Photo d'illustration d'Emmanuel Macron et le Premier ministre irlandais Micheal Martin, lors d'un sommet européen sur le coronavirus le 11 décembre 2020 à Bruxelles. Olivier Hoslet/Pool via REUTERS (Photo: POOL via REUTERS)
Photo d'illustration d'Emmanuel Macron et le Premier ministre irlandais Micheal Martin, lors d'un sommet européen sur le coronavirus le 11 décembre 2020 à Bruxelles. Olivier Hoslet/Pool via REUTERS (Photo: POOL via REUTERS)

POLITIQUE - Objectif du jour: renforcer ses amitiés. La visite officielle d’Emmanuel Macron en Irlande ce jeudi 26 août répond d’abord à une promesse, celle de visiter tous les états membres de l’UE pendant son mandat. Mais il s’agit aussi et surtout de consolider son amitié avec un partenaire dont elle est “le plus proche voisin” dans l’Union, au moment où les discussions avec Royaume-Uni, ex-allié, patinent.

En arrivant à Dublin ce jeudi à 10h, heure locale, Emmanuel Macron entame une visite express, où il rencontrera le président irlandais Michael Higgins, le Premier ministre Micheal Martin, ainsi que plusieurs personnalités irlandaises. Accompagné du ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, de l’Économie, Bruno Le Maire et du secrétaire d’État chargé des relations européennes, Clément Beaune, le chef de l’État aura moins de 24h pour aborder une série de sujets.

Certains, de l’ordre du partenariat entre États, doivent permettre d’“approfondir” la relation franco-irlandaise. D’autres seront plus sensibles: par exemple, l’harmonisation de la taxation des multinationales, à propos de laquelle l’Irlande traîne les pieds. Sans oublier le fameux protocole d’accord sur l’Irlande du Nord, conclu dans le cadre du Brexit et qui empoisonne les relations franco-britanniques.

Créer des passerelles privilégiées avec l’Irlande

Avant d’aborder les sujets qui fâchent, Emmanuel Macron et Jean-Yves Le Drian adopteront avec leurs homologues irlandais un “plan d’action franco-irlandais”. Comprendre: renforcer les liens entre les deux pays dans plusieurs domaines, à commencer par l’enseignement supérieur.

L’une des actions les plus concrètes concerne la mise en place d’un “projet de mobilité des professeurs”, sorte d’Erasmus des enseignants. Il s’agit d’“une première entre deux pays européens” précise l’Élysée qui y voit le “prolongement du projet d’université européenne”.

Crise oblige, l’Afghanistan s’invite au programme. La question du nombre de réfugiés afghans accueillis pourrait être abordée. Le gouvernement irlandais a promis la délivrance de 200 visas humanitaires, un chiffre jugé insuffisant par les associations humanitaires locales. La France, qui en a déjà rapatrié près d’un millier (hors Français expatriés) pourrait-elle faire pression que Dublin revoie sa capacité d’accueil? “C’est une question qui se pose plus généralement au niveau européen”, balaye l’Élysée, qui souligne au passage l’initiative franco-allemande amorcée sur ce point.

Trouver des compromis...

Mais la bonne entente et les espoirs de partenariats affichés ne doivent pas faire oublier les sujets qui fâchent. C’est d’ailleurs la nécessité “d’échanges au plus haut niveau entre la France et l’Irlande” sur deux sujets brûlants qui a “guidé” le choix d’une visite en Irlande.

Le premier se résume en un mot: les impôts. Plus précisément “l’accord international sur la fiscalité” conclu en juillet par l’OCDE et à propos duquel l’Irlande a émis des “réserves”.

Défendu par 130 pays, dont les États-Unis et la France, l’accord de l’OCDE prévoit de taxer les bénéfices des multinationales avec un taux minimum d’au moins 15%. En s’alignant, l’Irlande, avec son taux d’imposition des sociétés parmi les plus bas au monde, à 12,5%, prend le risque de voir déménager une série d’entreprises, notamment américaines, géants de la technologie et de la pharmacie. D’où leurs réticences.

Sur ce point, Paris n’est pas disposé à lâcher: “Il n’y a pas de changement dans la position française” sur le seuil minimum des 15%, affirme le Palais. Sans toutefois exclure catégoriquement certains aménagements pour trouver un compromis: l’accord de l’OCDE “doit encore être discuté sur un certain nombre de détails et les échanges continuent et vont se poursuivre, avec bien sûr l’Irlande”. L’Élysée se réjouit d’ailleurs de voir que Dublin “n’a pas entièrement fermé la porte” à l’accord et “a donné des signes de disponibilité pour avancer”.

... sans se dédire

Deuxième sujet de crispation, et pas des moindres: “La mise en œuvre du protocole sur l’Irlande du Nord”. Une bonne entente sur le sujet entre Paris et Dublin est capitale s’ils veulent peser face à Londres qui accuse Bruxelles d’adopter une “approche trop puriste” du texte.

Le protocole nord-irlandais maintient la province britannique d’Irlande du Nord dans le marché unique et l’union douanière européens pour les marchandises. Il doit permettre d’éviter le retour d’une frontière physique entre la province britannique et la République d’Irlande, afin de préserver la paix conclue en 1998. Londres, qui juge le protocole inapplicable en l’état, a mis en place des “périodes de grâce”, par exemple sur les importations de viande en Irlande du Nord qui sont normalement interdites depuis un pays hors UE.

La prolongation de cette phase de transition n’est pas exclue par le gouvernement britannique, au grand dam de Bruxelles et Paris qui appellent Boris Johnson à respecter ses engagements. “L’Union européenne a fait sa part du chemin pour trouver des solutions pragmatiques dans la mise en œuvre du protocole. On ne peut pas en dire autant de l’autre partie où nous attendons encore une possibilité d’accéder aux bases de données douanières britanniques et à ce que des capacités d’agrandissement des contrôles en mer d’Irlande soient mises en place”, tacle le Château.

Selon la volonté d’Emmanuel Macron, la visite en Irlande doit aboutir à une relation bilatérale plus forte. Elle devrait aussi - et c’est non négligeable dans la perspective d’une présidence française de l’UE en janvier 2022 - lui donner davantage de poids face à certains membres moins alignés. À commencer par la Hongrie, qui fait partie des trois derniers pays européens que le dirigeant français souhaite visiter. À ce stade, la présidence affirme que le déplacement est toujours dans les plans. Sans s’avancer sur une date.

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Cet article a été initialement publié sur Le HuffPost et a été actualisé.

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