"Ma mère est trop âgée pour enjamber la baignoire" : puis-je demander à mon bailleur d'adapter mon logement à la perte d'autonomie ?

GALÈRE DE LOGEMENT - Il n’est pas toujours facile de résoudre un problème dans son logement. Yahoo vous livre les conseils des experts de l’immobilier pour mieux connaître et faire valoir vos droits. L'ordre du jour : les travaux d'adaptation pour un senior en perte d'autonomie.

Avec l'âge, certains logements ne sont pas toujours adaptés face à la perte d'autonomie ou aux tracas de santé (Crédits : Getty Images).

Depuis quelques années, Guy héberge sa mère chez lui, dans un appartement dont il est locataire. Mais les années passant, il observe qu'elle ne se déplace plus aussi facilement qu'avant, et que son appartement n'est pas tout à fait adapté. "Elle a du mal à enjamber la baignoire pour faire sa toilette, j'ai demandé au bailleur de la remplacer par une douche, mais il a refusé", raconte-t-il, s'interrogeant sur les recours. La population française étant vieillissante, de plus en plus de locataires peuvent être amenés à se demander comment leur logement pourrait être mieux adapté en cas de perte d'autonomie. On fait le point.

En cas de perte d'équilibre ou de souplesse, il peut être pratique d'installer des poignées dans la salle de bain et les toilettes, et de remplacer une baignoire par une douche italienne, c'est-à-dire une douche de plain-pied, installée au même niveau que le sol.

"Le locataire peut faire des travaux d'aménagement, mais pas de transformation, en vertu de l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989 (paragraphe f)", rappelle David Rodrigues, juriste au sein de l'association Consommation Logement Cadre de vie (CLCV). "Si le locataire veut faire des travaux importants, comme abattre une cloison, changer la disposition des pièces, il lui faut l'accord préalable du bailleur. Sinon, le bailleur pourra demander la résiliation judiciaire du bail ou exiger la remise en l'état du logement, aux frais du locataire".

Voilà pour les règles générales. Mais la loi prévoit un régime dérogatoire : "le locataire a le droit de réaliser des travaux pour adapter le logement aux personnes en situation de handicap ou de perte d'autonomie", explique David Rodrigues. Le décret du 29 septembre 2016 liste d'ailleurs les types de travaux qu'un locataire a le droit de faire dans ce cas de figure : modification ou suppression de cloisons et de portes, aménagement des pièces d'eau ou encore installation d'élévateurs.

Le locataire doit respecter la démarche fixée par la loi : il faudra toujours envoyer une demande écrite au bailleur, par courrier recommandé avec accusé de réception. "Le bailleur peut s'opposer, mais il doit motiver son refus", poursuit le juriste. Et s'il ne répond pas dans les deux mois suivant la réception de la lettre, le locataire peut effectuer les travaux, et le bailleur ne pourra pas exiger la remise des lieux en l'état lorsqu'il partira.

Commencez par contacter votre bailleur pour lui partager vos besoins de travaux. Il peut voir un intérêt à les effectuer, s'il veut rendre son logement plus attractif pour certaines catégories de locataires. S'il refuse de les financer et même de les autoriser, envoyez-lui une demande motivée par lettre recommandée, en vous appuyant sur ce modèle de courrier. Détaillez précisément les modifications que vous souhaitez réaliser et l'entreprise que vous avez choisie.

Une fois que vous aurez reçu son accord écrit, ou que le délai des deux mois sans réponse se sera écoulé, vous pourrez lancer vos travaux. Dernière étape, deux mois après la fin des travaux, vous devrez à nouveau contacter le bailleur pour lui signaler qu'ils ont été effectués comme prévu.

Quelques conseils financiers et pratiques : pensez à vérifier si vous êtes éligible à des aides en consultant le site du service public dédié aux personnes âgées. N'hésitez pas à contacter votre assurance habitation pour savoir si votre couverture restera identique en cas de modification de votre logement.

Si le bailleur refuse que vous fassiez les travaux, il doit motiver son refus, c'est-à-dire le justifier avec des arguments pertinents. Par exemple, si vos travaux impliquent de modifier un mur porteur, ou risquent de mettre en danger la plomberie. Si vous souhaitez installer des volets électriques parce que vous n'arrivez pas à manipuler vos volets mécaniques, le bailleur peut vous demander d'attendre. En effet, l'accord de la copropriété réunie en assemblée générale est obligatoire pour les travaux modifiant l'aspect extérieur de l'immeuble.

En cas de refus motivé du bailleur, vous courrez le risque qu'il exige que vous remettiez le logement en l'état à vos frais. "Si le locataire estime que le refus du bailleur est abusif, il peut engager sa responsabilité", précise David Rodrigues de la CLCV. Il faudra alors lancer des démarches judiciaires.

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