La « météo plastique » lancée à Paris pour lutter contre la pollution

« The Plastic Forecast » est un bulletin météo expérimental visant à estimer la pollution produite par les microparticules de plastique à un endroit donné. Il a été inauguré à Paris le 25 mai 2023.
« The Plastic Forecast » est un bulletin météo expérimental visant à estimer la pollution produite par les microparticules de plastique à un endroit donné. Il a été inauguré à Paris le 25 mai 2023.

ENVIRONNEMENT - Après la pluie… les microparticules de plastique. Un tout nouveau type de bulletin météo a été inauguré ce jeudi 25 mai à Paris par le ministre de l’Écologie Christophe Béchu et la journaliste Chloé Nabédian, rapporte Le Monde : celui de la « pollution plastique. » Une initiative qui tombe à pic, alors que la capitale française accueillera dès lundi les diplomates de 175 pays pour les négociations d’un futur traité sur la pollution plastique.

À en croire Minderoo, la fondation australienne derrière ce projet, c’est donc un lourd crachin persistant composé de milliards de particules de microplastiques qui devrait s’abattre la semaine prochaine sur Paris.

Dans les prochains jours, entre 40 et 48 kilogrammes de morceaux de plastique devraient tomber sur la capitale, selon le Plastic Forecast. Des « précipitations » relativement faibles, et pour cause : pas une goutte de pluie n’est attendue ces prochains jours. Si les particules de plastique dans l’atmosphère s’accumulent constamment sur le sol, comme le précise Plastic Forecast, il peut en tomber près de 10 fois plus lorsqu’il pleut.

Des dommages « insoupçonnés » sur la santé

« Voilà qui devrait aiguiser l’attention des négociateurs », estime Marcus Gover, responsable de la recherche sur les plastiques à la fondation australienne Minderoo : « les particules de plastique se décomposent dans l’environnement et ce cocktail toxique finit dans nos corps, où il cause des dommages insoupçonnés à notre santé. »

L’inquiétude soulevée par l’impact des plastiques sur l’environnement et la santé s’est accrue ces dernières années, parallèlement au crescendo de recherches documentant leur omniprésence. Dans la nature, des microplastiques multicolores - inférieurs, par définition, à cinq millimètres de diamètre - ont été retrouvés dans la glace près du pôle Nord et dans les entrailles de poissons nageant dans les recoins les plus profonds de l’océan.

Selon le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), les débris plastiques tueraient chaque année plus d’un million d’oiseaux des mers et 100 000 mammifères marins. Les baleines bleues, qui se nourrissent par filtration, consomment jusqu’à 10 millions de microplastiques par jour. Chez l’homme, des morceaux microscopiques ont été détectés dans le sang, le lait maternel et le placenta.

Sortir de la « politique de l’autruche »

Des tests sur les animaux ont établi un lien entre les substances chimiques dans les microplastiques et des risques accrus de cancer, de problèmes de reproduction et de mutations de l’ADN. Mais les données sur la santé humaine manquent encore.

« Les plastiques dans l’organisme qui devraient nous inquiéter le plus sont probablement ceux entre 10 nanomètres et un micromètre », déclare à l’AFP le pédiatre Christos Symeonides, chercheur à la Fondation Minderoo. « Ce sont eux qui ont le plus de chances de traverser nos membranes biologiques et de pénétrer dans les tissus, y compris la barrière hémato-encéphalique », barrière entre le sang et le système nerveux, ajoute-t-il. « Sur les risques sanitaires des microplastiques, nous commençons tout juste à sortir de la politique de l’autruche », estime-t-il.

Les prévisions pour la semaine prochaine à Paris ne concernent toutefois que les particules beaucoup plus grosses, principalement des fibres synthétiques d’au moins 50 microns. Par comparaison, un cheveu humain mesure environ 80 microns (ou 80 000 nanomètres). « Il est donc probable que la quantité de plastique réellement accumulée soit bien supérieure aux prévisions du Plastic Forecast », alerte le bulletin météo sur son site Internet.

Une production en augmentation constante

La méthode mise au point par la Fondation Minderoo ne mesure pas vraiment en temps réel le plastique qui flotte dans l’atmosphère. Elle extrapole des recherches menées à Paris depuis 2015, qui ont permis de collecter des échantillons à plusieurs endroits tout au long de l’année et trier en laboratoire.

Menés par des scientifiques français, ces travaux pionniers ont révélé que la plupart des particules de plastique tombant sur les 2 500 kilomètres carrés de l’unité urbaine de Paris étaient du nylon et du polyester, probablement issus de vêtements. Et pour une partie, des résidus de pneus, disséminés en particulier au freinage.

L’année dernière, 175 nations sont convenues de conclure d’ici 2024 un traité juridiquement contraignant pour réduire la pollution plastique. Si rien n’est fait, selon l’OCDE, la production annuelle de plastiques pourrait tripler d’ici 2060. Elle atteindrait 1,2 milliard de tonnes et les déchets dépasseraient le milliard chaque année.

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