"Le médiateur le plus accommodant" : comment le Qatar est devenu l'acteur clé de l'accord entre Israël et le Hamas
De par son autorité régionale, mais aussi sa proximité avec les États-Unis et le Hamas, l'État gazier est devenu un acteur incontournable dans les négociations dès les attaques du 7 octobre passé.
Un réel motif d'espoir. Ce mercredi aux premières heures de la journée, un accord a été trouvé entre Israël et le Hamas pour une "pause humanitaire" à Gaza qui doit s'accompagner d'un échange de 50 otages israéliens et de 150 prisonniers palestiniens.
Leur identité n'a pas encore été révélée, mais un haut responsable de la Maison Blanche a indiqué que l'accord inclut la libération de trois Américaines dont une enfant. La France espère pour sa part la libération de trois ressortissants.
Alors que la communauté internationale se réjouit de cette annonce, plusieurs représentants ont également salué le rôle majeur du Qatar dans l'accord.
Rôle d'équilibriste
En plus des traditionnels intermédiaires de la région, la Turquie et l'Égypte, la position du Qatar, proche à la fois du Hamas et des États-Unis, était très attendue dans les négociations, bien que l'émirat n'entretienne pas de relations diplomatiques officielles avec Israël.
Doha, où est installé le bureau politique du Hamas depuis plus de dix ans, est en outre respecté par les États-Unis, fidèle allié d'Israël. L'État gazier abrite en effet la plus grande base militaire américaine dans la région.
"Le médiateur le plus accommodant, c'est le Qatar, un petit État qui n'a pas d'agenda régional, qui n'a pas le souci d'un usage politique de la médiation", analyse Hasni Abidi, directeur du Centre d'études et de recherche sur le monde arabe et la Méditerranée, basé à Genève, auprès de l'AFP.
"Il n'y a pas foule de médiateurs", ajoute-t-il. Les acteurs potentiels sont "uniquement ceux qui ont noué des relations de longue date avec le Hamas et donc les seuls habilités à prendre contact avec ses dirigeants".
Interlocuteur privilégié
De fait, le Qatar s'est peu à peu "spécialisé dans la libération d'otages", souligne pour sa part, toujours à l'AFP, Étienne Dignat, du Centre de recherches internationales (Ceri), rappelant qu'il était intervenu dans la récente libération d'Américains prisonniers en Iran.
Très vite après l'attaque terroriste sanglante et sans précédent le 7 octobre du Hamas sur le sol d'Israël, le Qatar a proposé sa médiation pour une éventuelle libération des otages emmenés dans la bande de Gaza par le groupe islamiste palestinien. Une cellule y est rapidement installée et la Maison Blanche y est représentée.
En octobre toujours, et en collaboration avec l'Égypte, le Qatar a ainsi obtenu la libération de quatre otages: deux Américaines et deux Israéliennes.
Ce n'est pas un hasard si Jean-Yves le Drian, envoyé spécial pour le Liban du président français Emmanuel Macron, était au Qatar cette semaine, selon des sources diplomatiques. Il y a rencontré le ministre des Affaires étrangères, sur le dossier Israël et le Liban, a rapporté l'agence de presse qatarie, QNA.
Le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken a lui aussi fait le déplacement à Doha, tandis que l'Allemagne a appelé le Qatar à s'investir pour la libération de ses otages.
"Le Qatar joue un double jeu: il maintient à la fois les relations avec les groupes terroristes et certaines nations occidentales qui lui sont redevables", observe Etienne Dignat.
Dans le passé, l'émirat avait invité les talibans à ouvrir un bureau à Doha avec l'aval des Etats-Unis, permettant de négocier le retrait des forces américaines d'Afghanistan en 2021, suivi du retour des talibans au pouvoir.
Article original publié sur BFMTV.com
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