Mélanie Boulanger, l’ex-maire de Canteleu, au tribunal pour le procès du trafic de drogue dans sa commune

Mélanie Boulanger, ex-maire de Canteleu (Seine-Maritime) nie toute implication dans cette affaire de trafics de stupéfiants au cœur de sa commune.
www.normandie2021.fr Mélanie Boulanger, ex-maire de Canteleu (Seine-Maritime) nie toute implication dans cette affaire de trafics de stupéfiants au cœur de sa commune.

JUSTICE - Elle sera jugée, en même temps que 18 autres prévenus. Fruit de deux ans d’enquête, le tentaculaire dossier Canteleu est présenté devant le tribunal de Bobigny ce lundi 27 mai. Ce procès doit notamment permettre de juger l’ex-maire de cette commune de 14 000 habitants de l’agglomération de Rouen. Avec comme toile de fond, l’emprise du « deal » à l’échelle d’une petite commune.

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Élue maire de la ville de Seine-Maritime en 2014, Mélanie Boulanger est soupçonnée d’avoir fait pression sur les services de police pour qu’ils ne gênent pas les affaires du redoutable clan Meziani, réputé pour tenir le deal dans sa ville normande et y faire régner la terreur.

Mais elle devra encore attendre pour connaître la réponse de la justice, puisqu’à l’ouverture de l’audience, le tribunal correctionnel de Bobigny a directement suspendu les débats ce lundi matin.

Saisi d’une demande de sursis à statuer sur un pourvoi en cassation, « le tribunal met l’affaire en continuation au lundi 3 juin », a déclaré le président de la 13e chambre Jean-Baptiste Acchiardi. La continuation éventuelle du procès dépendra donc de l’examen ou non du pourvoi dans l’intervalle par la haute juridiction.

Aux côtés de la maire socialiste, la 13e chambre du tribunal correctionnel de Seine-Saint-Denis devra donc juger pendant un mois les principaux acteurs présumés du réseau : les têtes, leurs lieutenants, des fournisseurs et blanchisseurs. Après son renvoi devant la justice, Mélanie Boulanger avait finalement démissionné de son mandat de maire en début d’année 2024, invoquant des « raisons de santé ». Elle devrait maintenant connaître la décision de la justice sur son cas d’ici la fin du mois de juin.

Conversation compromettante

Dans cette affaire qui illustre parfaitement l’enracinement et la violence des narcotrafics à l’échelle d’une petite commune, l’ancienne tête de liste PS-EELV en Normandie aux élections régionales de 2021, avait été interpellée en octobre 2021 et mise en examen pour complicité en avril 2022. Mais l’ancienne édile dément toujours les accusations contre elle.

Pourtant, une conversation téléphonique sous écoute présente dans le dossier montre qu’un des frères de la fratrie Meziani la menace d’une part de mettre la commune à feu et à sang, et de l’autre lui promet de garantir sa réélection et l’ordre public à Canteleu si elle rend le service qu’il lui demande.

L’affaire Canteleu avait véritablement démarré en septembre 2019 avec l’arrestation sur un parking de Saint-Denis de deux individus suspects procédant à une transaction de drogues. L’un est porteur de 50 000 euros en liquide, l’autre de deux kilos de cocaïne pure à 80 %.

Les investigations sur l’acheteur amènent rapidement les policiers de Seine-Saint-Denis à Canteleu, base de la famille Meziani soupçonnée d’être l’un des principaux acteurs du trafic de drogues dans la région rouennaise. Une famille qui avait été récemment chamboulée par la mort du chef de famille Mohamed dans un accident de la route, lors d’un probable « go-fast ». De quoi laisser deux de ses frères, Aziz et Montacer, reprendre le business familial.

Une famille au cœur du trafic

L’enquête, riche en sonorisations et en écoutes, va finalement mettre au jour un important réseau d’importation et de vente de stupéfiants, écoulant aussi bien du cannabis que de l’héroïne et de la cocaïne.

Selon les estimations des policiers, l’organisation engrange plus de dix millions d’euros de bénéfices annuels rien que pour la cocaïne et l’héroïne. Tout l’inverse du modeste train de vie déclaré par les mis en cause.

Des sommes considérables sont utilisées en liquide pour l’achat de voitures de luxe ou le paiement d’onéreux frais dentaires. Mais une partie de ce cash est blanchie dans des commerces de proximité − un bar de la place de la mairie de Canteleu ou une chicha-salon de thé − ou recyclé via des entreprises fictives. Enfin, d’autres capitaux sont expédiés au Maroc pour des achats immobiliers ou, à l’occasion, financer la construction de mosquées dans le pays.

Également au cœur de ce procès, le grand chef présumé de la famille Meziani, Aziz, dit « Le U », s’est enfui au Maroc durant la phase d’enquête. Il sera donc jugé en son absence par le tribunal de Bobigny. Il reste, à ce titre, accusé d’avoir relayé les demandes de ses amis trafiquants auprès de la maire Mélanie Boulanger. L’adjoint de l’ancienne maire, Hasbi Colak dément l’ensemble des accusations retenues contre lui.

« Nous attendons ce procès avec une certaine impatience pour pouvoir démontrer de façon très claire et très précise qu’il n’a strictement rien à se reprocher », a d’ailleurs déclaré à l’AFP son avocat Jérémy Kalfon.

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