Lutte de pouvoir en vue en Haïti après l'assassinat du président

LUTTE DE POUVOIR EN VUE EN HAÏTI APRÈS L'ASSASSINAT DU PRÉSIDENT

PORT-AU-PRINCE (Reuters) - Une lutte de pouvoir se profile en Haïti après que le nouveau Premier ministre désigné peu avant l'assassinat du président haïtien cette semaine a déclaré qu'il lui revenait - et non au Premier ministre par intérim - de diriger le pays et qu'il était en train de former un gouvernement à cet effet.

Ariel Henry, un neurochirurgien nommé Premier ministre par le président Jovenel Moise lundi, deux jours l'assassinant du chef de l'Etat par un commando à son domicile de Port-au-Prince, a déclaré qu'il était désormais la plus haute autorité du pays, contrairement au Premier ministre par intérim Claude Joseph.

"Après l'assassinat du président, je suis devenu la plus haute autorité légale et régulière parce qu'il y avait un décret me nommant", a-t-il dit à Reuters lors d'un entretien téléphonique vendredi soir.

Ariel Henry n'avait pas prêté serment pour remplacer Claude Joseph au moment de l'assassinat, ce qui entretient la confusion sur l'identité du chef légitime des 11 millions d'habitants d'Haïti, qui se partagent l'île d'Hispaniola avec la République dominicaine.

Claude Joseph, nommé par intérim en avril après la démission de Joseph Jouthe, a jusqu'à présent repris les rênes du pouvoir en devenant le fer de lance de la réponse du gouvernement à l'assassinat du président, appelant les États-Unis à le soutenir et déclarant l'état d'urgence pour 15 jours.

Le ministre en charge des élections, Mathias Pierre, a déclaré que Claude Joseph conserverait ce rôle jusqu'à la tenue des élections présidentielles et législatives du 26 septembre.

Ariel Henry a pour sa part déclaré que le gouvernement qu'il était en train de former mettrait en place un nouveau conseil électoral, le précédent ayant été jugé trop partisan, et que l'instance fixerait de nouvelles dates pour les élections.

"Je ne sais pas à quelle date elles auront lieu, tout ce que je sais, c'est que nous ne pouvons pas prendre trop de temps pour faire ces élections. Nous devons les faire dès que possible", a-t-il dit.

Le Sénat d'Haïti, qui ne comprend actuellement qu'un tiers des 30 sénateurs qui y siègent, a nommé vendredi son président Joseph Lambert au poste de chef de l'Etat par intérim, selon un document examiné par Reuters.

Ariel Henry, prié de dire s'il pourrait partager le pouvoir avec Joseph Lambert, s'est dit "prêt à diriger le pays avec tous ceux qui veulent aller de l'avant".

La constitution d'Haïti de 1987 stipule que le chef de la Cour suprême doit assumer la présidence par intérim. Mais des amendements controversés prévoient que ce rôle revient au Premier ministre ou que le Parlement doit élire un président au cours de la dernière année du mandat d'un chef de l'Etat, ce qui était le cas pour Jovenel Moise.

Pour compliquer encore la situation , le président de la Cour suprême est décédé le mois dernier après avoir contracté le COVID-19 sur fond de recrudescence des infections dans l'un des rares pays à n'avoir pas encore lancé de campagne de vaccination.

Haïti n'a pas non plus de Parlement en place car les élections législatives qui étaient prévues fin 2019 ont été reportées en raison des troubles politiques.

(Andre Paultre et Sarah Marsh, version française Benjamin Mallet)