Une lune glacée serait à l’origine de la formation des anneaux de Saturne

Des scientifiques ont découvert une partie essentielle de l’histoire de Saturne. La dislocation d’une lune glacée pourrait expliquer la formation de ses célèbres anneaux, il y a environ 100 millions d’années.

ESPACE - Si les anneaux de Saturne sont beaux à regarder, ils sont aussi un casse-tête colossal pour les scientifiques qui tentent de les étudier. Quand et comment sont-ils arrivés à se former autour de cette géante planète gazeuse ? Une nouvelle étude publiée dans la revue Science ce jeudi 15 septembre, apporte des éléments de réponse.

« Les anneaux de Saturne ont été découverts par Galilée il y a environ 400 ans, et ils sont l’un des objets les plus intéressants à observer dans le système solaire », lance avec enthousiasme Jack Wisdom, spécialiste de la dynamique planétaire au Massachusetts Institute of Technology (MIT) et auteur principal de l’étude. Avec son équipe, il a mis au point un modèle, démontrant que les fameux anneaux sont apparus récemment dans notre système solaire, et même très récemment à l’échelle astronomique.

Car c’est là l’une des grandes questions que se posent les scientifiques au sujet de Saturne : ces innombrables morceaux de glace sont-ils apparus il y a des milliards d’années - et sont donc aussi anciens que le système solaire lui-même - ou bien il y a seulement environ 100 millions d’années ? Cette seconde hypothèse avait pris du poids dans la communauté scientifique après les observations de la sonde Cassini en 2017.

L’engin spatial avait en effet découvert que les anneaux étaient exposés à une pluie de poussière de suie provenant du système solaire, ce qui aurait tendance à les assombrir avec le temps. Mais il ne sont alors pas assez « sales » pour avoir 4,5 milliards d’années d’existence. Selon Jack Wisdom, ces anneaux relativement intacts doivent logiquement être jeunes. Mais comment expliquer ce qui a créé les anneaux, en particulier si tard dans l’histoire du système solaire ?

Les scientifiques travaillaient sur l’inclinaison de Saturne

C’est en se penchant sur un tout autre sujet que les scientifiques ont trouvé une explication à la récente formation de ces anneaux. Ils travaillaient en effet au départ sur l’étonnante inclinaison de Saturne.

L’axe de rotation de Saturne est en effet incliné à 26,7° par rapport à la verticale. Or Saturne étant une géante gazeuse, le processus d’accumulation de matière ayant conduit à sa formation aurait du la laisser perpendiculaire au plan de son orbite.

Pour trouver une explication, les chercheurs sont partis d’une découverte récente : Titan, le plus gros satellite de Saturne, s’éloigne peu à peu d’elle... Selon les chercheurs, ce mouvement a progressivement modifié l’axe de rotation de Saturne. Mais l’inclinaison constatée de la planète est supérieure à ce à quoi on pourrait s’attendre. Pourquoi ? Seul un puissant événement a pu l’interrompre.

Les scientifiques ont donc émis une nouvelle hypothèse. La dislocation d’une lune, anciennement présente dans le système de Saturne, aurait provoqué un déséquilibre supplémentaire. Elle aurait ainsi modifié l’inclinaison de la planète il y a environ 160 millions d’années, justement au moment de la formation des anneaux de Saturne. L’équipe a effectué 390 simulations au total de cet événement.

Une lune nommée « Chrysalide »

Dans certains scénarios, la lune perdue est entrée en collision avec Titan ou Japet, un autre satellite naturel de la planète ; dans d’autres, elle a été complètement éjectée du système de Saturne. Mais dans 17 des simulations, la lune a frôlé Saturne, où elle aurait pu être déchiquetée par les forces gravitationnelles, devenant finalement les anneaux emblématiques.

La Lune disparue a été baptisée Chrysalis, Chrysalide en français, par Jack Wisdom, comparant l’émergence des anneaux de Saturne à un papillon sortant d’un cocon. Les scientifiques pensent que Chrysalis était un peu plus petite que notre Lune à nous, et environ de la taille d’un autre satellite de Saturne, Japet. Or ce dernier est presque entièrement constitué d’eau glacée.

« Il est donc plausible de faire l’hypothèse que Chrysalis était également faite d’eau glacée, et c’est ce dont on a besoin pour créer les anneaux », qui en sont constitués à 99 %, relève le professeur. A-t-il l’impression d’avoir finalement résolu le mystère des anneaux de Saturne ? « Nous avons fourni une bonne contribution », répond-il avant d’ajouter : le système de Saturne et ses satellites recèlent encore « beaucoup de mystères ».

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