Lumière artificielle : attention à la toxicité de certains éclairages domestiques

Selon une récente étude, il serait nécessaire de reconsidérer les seuils réglementaires d’exposition à la lumière artificielle, sûrement trop élevés.

La lumière verte serait également nocive, favorisant la survenue d’une réponse inflammatoire délétère. (Getty Images/iStockphoto)

Si la lumière est évidemment essentielle à notre quotidien, en excès, elle peut endommager l'oeil comme l'explique Alicia Torriglia, chercheuse Inserm au Centre de recherche des Cordeliers à Paris. Dans une nouvelle étude publiée dans la revue Environment International, Alicia Torriglia rappelle que si des normes restrictives s’appliquent aux sources lumineuses artificielles, comme les ampoules incandescentes ou les LED, ces normes pourraient aujourd'hui être trop permissives.

En effet, les valeurs limites d’exposition de la rétine humaine ont été établies dans les années 1980, les expériences réalisées ont porté uniquement sur les effets de la lumière bleue. "Elles ont montré qu’une exposition devenait nocive à partir d’une dose de 22 joules/cm² pour les primates et de 11 joules/cm² pour les rongeurs (rats, souris, écureuils). Ces valeurs ont été utilisées pour fixer la réglementation normative de nos éclairages, encore appliquée à ce jour", rapporte le communiqué de l'Inserm. Toutefois, en cherchant à évaluer l’impact du spectre lumineux dans sa totalité, chez le rat, la chercheuse a montré que même de très faibles doses de lumière LED peuvent induire une mort cellulaire au niveau de la rétine.

Attention à la lumière verte

"Nous avons dû interrompre nos expériences au tiers du temps prévu, pour ne pas faire souffrir les animaux exposés à une lumière qui respectait pourtant les seuils établis", détaille la chercheuse. Et de compléter : "La limite de 11 J/cm² pour la lumière bleue est nettement surévaluée pour le rat, ce qui laisse supposer que c’est sûrement le cas aussi pour le primate et l’humain". Précisément, les doses toxiques de lumière bleue chez le rat sont plus proches de 0,2 J/cm², c'est-à-dire 50 fois moins.

Autre aspect des travaux menés par la scientifique, la lumière verte serait également nocive, favorisant la survenue d’une réponse inflammatoire délétère. "La teneur en vert de la lumière blanche induit une invasion de la rétine par des cellules pro-inflammatoires (des macrophages) huit fois plus importante que la lumière bleue", pointe l'étude. Ainsi, le seuil de toxicité de la lumière blanche complète actuellement accepté chez le rat est surestimé.

La lumière rouge favorable

De plus, la lumière rouge, présente dans l’éclairage émis par les ampoules à incandescence est au contraire favorable. "Elle réduit la perte de photorécepteurs, les cellules sensitives de la rétine. C’est donc l’ensemble de la composition de la lumière blanche qu’il faut prendre en compte pour évaluer sa toxicité", rapporte l'Inserm.

Au regard de ces conclusions, la chercheuse estime qu'il serait nécessaire de reconsidérer les seuils réglementaires d’exposition à la lumière artificielle, sûrement trop élevés. "L’effet de la lumière sur la rétine est complexe, elle ne dépend pas seulement de la quantité, mais aussi du moment des expositions. La rétine a un rythme circadien et sa sensibilité pendant la journée n’est pas la même que la nuit. Des changements physiologiques qui interviennent la nuit la rendent plus sensible à la lumière et plus assujettie au stress phototoxique", met en garde Alicia Torriglia.