L'UE parvient à un "accord politique" pour sanctionner les colons israéliens extrémistes
La percée s'est produite lors d'une réunion des ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne, lundi, au cours de laquelle la question a été mise sur la table afin de donner une nouvelle chance à la diplomatie.
"Nous avons discuté des sanctions contre le Hamas. Et nous nous sommes mis d'accord sur des sanctions à l'encontre des colons extrémistes. Cela n'avait pas été possible lors du dernier Conseil des Affaires étrangères. Cette fois-ci, c'est possible. Un compromis solide a été trouvé au niveau du travail et j'espère que cela continuera jusqu'à l'adoption complète bientôt", a annoncé le chef de la politique étrangère de l'Union européenne, Josep Borrell, à la fin de la réunion, "mais l'accord politique est là".
Les sanctions sont en préparation depuis des mois et ont été initialement bloquées par une poignée de pays, dont l'Allemagne, la République tchèque et l'Autriche, qui comptent parmi les plus fervents partisans d'Israël au sein de l'Union européenne.
Mais la dévastation de la bande de Gaza et les informations persistantes faisant état de violences perpétrées par des ressortissants israéliens à l'encontre de Palestiniens ont conféré un caractère d'urgence aux pourparlers, qui se sont encore intensifiés après que les États-Unis, le Royaume-Uni et la France ont pris les devants et sanctionné une poignée de colons extrémistes.
Le dernier obstacle était la Hongrie qui, selon des diplomates, a fait savoir, la semaine dernière, qu'elle lèverait l'opposition, ce qui a fait naître l'espoir d'une percée lundi 18 mars 2024.
L'accord politique doit encore être adopté par les ambassadeurs. Ce n'est qu'à ce moment-là que l'identité des colons figurant sur la liste noire sera connue.
Les colonies de Cisjordanie sont illégales au regard du droit international et sont considérées comme un obstacle majeur à l'instauration d'une paix durable dans le cadre de la solution à deux États.
Cette décision s'inscrit dans le cadre d'une chorégraphie diplomatique minutieuse qui coïncide avec de nouvelles sanctions contre le Hamas, que l'Union européenne considère comme une organisation terroriste.
En réaction aux attentats du 7 octobre, qui ont tué plus de 1 100 civils en Israël, l'Union européenne a mis en place un régime de sanctions spécifiques visant toute personne ou entité soupçonnée de soutenir, matériellement ou financièrement, le Hamas et le Djihad islamique palestinien.
Six financiers ont été ajoutés à la liste noire le 19 janvier.
Cimetière à ciel ouvert
La réunion des ministres des Affaires étrangères de lundi s'est tenue alors que la Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC) publiait un nouveau rapport mettant en évidence l'extrême gravité de la crise humanitaire à Gaza, où plus de 31 000 personnes ont été tuées depuis le début de l'offensive israélienne, selon le Hamas.
Selon l'IPC, "l'ensemble de la population de la bande de Gaza (2,23 millions de personnes) est confrontée à des niveaux élevés d'insécurité alimentaire aiguë", la moitié de la population étant classée dans la catégorie "catastrophe". Dans la partie nord de l'enclave, la famine est "imminente".
Le conflit militaire, la rareté de l'aide humanitaire et l'accès limité aux denrées alimentaires, aux soins de santé, à l'eau et à l'assainissement sont autant de facteurs qui expliquent la détérioration de la situation.
"L'escalade des hostilités a causé des dommages considérables aux biens et aux infrastructures indispensables à la survie. Environ 50 % des bâtiments - et plus de 70 % dans les gouvernorats du nord - ont été endommagés ou détruits", indique le rapport.
Avant de se rendre à la réunion, Josep Borrell, responsable de la politique étrangère de l'UE, a dressé un tableau sombre de la situation sur le terrain.
"Gaza était avant la guerre la plus grande prison à ciel ouvert. Aujourd'hui, c'est le plus grand cimetière à ciel ouvert. Un cimetière pour des dizaines de milliers de personnes, mais aussi un cimetière pour nombre des principes les plus importants du droit humanitaire", a affirmé Josep Borrell aux journalistes.
Josep Borrell a également déclaré qu'il proposerait un "débat d'orientation politique" sur l'avenir de l'accord d'association UE-Israël, en vigueur depuis 2000. Le mois dernier, l'Espagne et l'Irlande, deux des voix les plus critiques de l'Union à l'égard du Premier ministre Benjamin Netanyahou, ont uni leurs forces et appelé à une "révision urgente" de l'accord.
Toutefois, lors de la réunion ministérielle, au moins six États membres se sont prononcés contre cette révision : "l'Allemagne, l'Italie, l'Autriche, la République tchèque, la Bulgarie et la Hongrie", ont déclaré plusieurs diplomates à Euronews, sous couvert d'anonymat.
Un diplomate a noté que la plupart des Etats soutenaient l'idée d'inviter le ministre israélien des affaires étrangères, Yisrael Katz, pour discuter de ce sujet et d'autres questions à Bruxelles.