Ce que l'on sait des accusations visant le sénateur Joël Guerriau, soupçonné d'avoir drogué une députée

Des accusations d'une extrême gravité. Ce jeudi 16 novembre, le sénateur Les indépendants de Loire-Atlantique Joël Guerriau a été placé en garde à vue à Paris, soupçonné d'avoir drogué une députée en vue d'une agression sexuelle. Une information révélée par nos confrères de RMC.

Vendredi soir, le sénateur a été mis en examen et placé sous contrôle judiciaire.

• Un sénateur accusé d’avoir voulu droguer une députée

Les faits se déroulent dans la soirée du mardi 14 novembre. Ce soir-là, la députée Sandrine Josso retrouve le sénateur Joël Guerriau. Les deux parlementaires, tous deux du même département, se connaissent depuis une dizaine d'années et ont prévu de se voir pour célébrer un événement.

Selon Sandrine Josso, leur relation est qualifiée d'amicale et sans ambiguïté. Plutôt que de dîner au restaurant, le sénateur propose à la députée de le rejoindre chez lui, dans le 6e arrondissement de Paris.

Vers 20h, Sandrine Josso arrive donc chez son collègue parlementaire. Elle note alors qu'il a un comportement étrange. Ce dernier lui propose plusieurs verres d'alcool qu'il prépare, seul, dans sa cuisine. Selon son récit, il la regarde avec une forme d'insistance et modifie la lumière de la pièce pour changer d'atmosphère. Selon ses premières déclarations aux enquêteurs, le sénateur insiste pour qu'ils "fassent la fête ensemble".

La victime a déclaré s'être sentie mal une vingtaine de minutes après avoir pris un verre proposé par le sénateur. Elle est victime de sueurs froides et sent que son cœur s'emballe. Dans sa plainte, elle précise qu'elle a pris peur à ce moment-là. Elle redoute que si elle confie son mal-être passager à Joël Guerriau, celui-ci va lui demander de rester chez lui et pourrait abuser d'elle.

Elle commande un taxi et quitte les lieux vers 22h. Elle arrive à l'Assemblée nationale où elle se confie à deux collègues. Ceux-ci appellent les pompiers et le Samu. À leur arrivée, les secours notent que ses pupilles sont fortement dilatées et que son cœur bat à un rythme anormal. Elle est hospitalisée à Lariboisière où des traces d'ecstasy sont mis en évidence dans son sang.

• Un sachet d'ecstasy retrouvé lors des perquisitions

Une plainte pour "administration d'une substance nuisible à son insu dans le but de commettre un viol ou une agression sexuelle" a été déposée par la députée. Un délit passible de 5 ans de prison et 75.000 euros d’amende. Sandrine Josso explique qu'elle ne comprend pas l'attitude de son collègue parlementaire, estimant avoir toujours eu une relation sans ambiguïté avec lui.

Une enquête en flagrance est ouverte par le parquet de Paris et Joël Guerriau est placé en garde à vue mercredi en début de soirée, son immunité parlementaire étant automatiquement levée.

Des perquisitions ont été menées au bureau de l'élu mais aussi à son domicile, où les enquêteurs retrouvent un sachet transparent contenant de la poudre qui, après analyse, se révèle être de l'ecstasy. Selon les informations de BFMTV, des analyses urinaires réalisées sur le sénateur ont permis de mettre en évidence, dans son sang, des traces de cocaïne, d'amphétamines, d'opiacées, de MDMA, de méthadone et de cannabis.

L'avocat du sénateur affirme ce vendredi soir que les analyses toxicologiques pratiquées sur son client "démontrent au contraire que Joel Guerriau est négatif à toutes les substances illicites".

• Joël Guerriau parle d'un quiproquo

Face aux enquêteurs, Joël Guerriau a expliqué que, traversant une période difficile et stressante, il s'est tourné vers un ami qui lui a fourni un "euphorisant". Lundi, il a mis un peu de poudre dans un verre avant de renoncer à la prendre. Il a alors remis le verre dans son placard. Toujours selon sa version, mardi soir, sans faire attention, il aurait repris ce verre pour y préparer une boisson pour la députée, une amie depuis une dizaine d'années, sans se rendre compte que la poudre était toujours dans le fond du verre. C'est ainsi qu'elle aurait été intoxiquée. Enfin, Joël Guerriau a aussi nié être un usager de drogues.

Me Rémi-Pierre Drai, avocat de Joël Guerriau, balaie d'un revers de main les accusations contre son client. "Nous sommes fort loin de l'interprétation scabreuse que l'on peut déduire à la lecture des premiers articles de presse".

Dans un second communiqué, l'avocat a estimé que la confrontation entre la députée et le sénateur avait permis à son client "de confirmer avec force sa version des faits qui ne permet pas, à ce stade de l'enquête, de caractériser une quelconque infraction".

Contactée par BFMTV, Julia Minkowski, l'avocate de Sandrine Josso, indique que sa cliente "est toujours en état de choc".

"Elle a dû déployer des forces physiques et intellectuelles monumentales pour surmonter sa terreur et s'extirper in extremis de ce guet-apens. À cela s'ajoute un sentiment de trahison et d'incompréhension totale, Joël Guerriau était un ami depuis une dizaine d'années, en lequel elle avait toute confiance, poursuit l'avocate de la plaignante.

• Mis en examen et suspendu

Le sénateur a été mis en examen pour "usage et détention de stupéfiants, et d’administration à une personne, à son insu, d’une substance de nature à altérer son discernement ou le contrôle de ses actes pour commettre un viol ou une agression sexuelle". Placé sous contrôle judiciaire à l'issue de sa garde à vue, Joël Guerriau a également interdiction de se rendre au domicile de la victime et interdiction d’entrer en contact avec les victimes et témoins.

Sur le plan politique, le sénateur a été suspendu provisoirement "à l'unanimité" par les membres de son parti Horizons ce samedi. Un peu plus tard, il a ensuite été suspendu par son groupe parlementaire, Les indépendants. Le groupe a par ailleurs indiqué engager une "procédure disciplinaire pouvant déboucher sur une exclusion".

Article original publié sur BFMTV.com