Loi immigration : une nouvelle version déposée au Sénat par les centristes, voici ce qu’elle contient

L’hémicycle du Sénat photographié le 3 octobre (illustration).
THOMAS SAMSON / AFP L’hémicycle du Sénat photographié le 3 octobre (illustration).

POLITIQUE - Ils remettent une pièce dans la machine. Le groupe centriste, allié de la droite au Sénat, a déposé une proposition de loi reprenant la plupart des mesures de la loi sur l’immigration censurées par le Conseil constitutionnel, relançant ce dossier ultrasensible pour la majorité.

Loi immigration : après la censure du Conseil constitutionnel, que reste-t-il du texte ?

Déposée fin janvier et en cours d’enregistrement par les services du Sénat, la proposition de loi de l’Union centriste, pilotée par son président Hervé Marseille (UDI), entend reprendre des dispositions « indispensables à la mise en œuvre d’une politique migratoire juste et efficace », sans « aucune défiance vis-à-vis du Conseil constitutionnel », selon l’exposé des motifs du texte consulté jeudi par l’AFP.

Le 25 janvier, les Sages avaient censuré de nombreuses mesures intégrées au projet de loi immigration à l’initiative de la droite, non pas sur le fond mais au motif qu’il s’agissait de cavaliers législatifs et n’entraient donc pas dans le périmètre du texte. Cela ouvrait donc la voie à de nouvelles initiatives parlementaires sur ces dispositifs, sans exclure qu’elles soient, à l’avenir, rejetées sur le fond.

Ces dispositions « ont été adoptées par l’Assemblée et le Sénat, je veux croire qu’(elles) pourront l’être à nouveau », avait assuré Hervé Marseille à l’AFP après la décision du Conseil. Les Républicains avaient eux demandé au gouvernement de reprendre lui-même ces mesures dans un projet de loi.

Le groupe LR au Sénat a lui aussi fait savoir jeudi que le président de la Commission des Lois, François-Noël Buffet, allait déposer prochainement une proposition de loi reprenant ces mesures, qui sera « convergente » avec celle des centristes.

Regroupement familial, prestations sociales… le retour de mesures controversées

Le texte des centristes reprend 16 mesures censurées, dont plusieurs avaient grandement irrité le camp présidentiel lors de leur intégration au projet de loi du gouvernement en décembre, après des négociations entre la droite et la Première ministre à l’époque Élisabeth Borne.

La proposition de l’Union centriste prévoit ainsi de durcir les conditions du regroupement familial en allongeant de 18 à 24 mois la durée de résidence requise pour y prétendre, en excluant du dispositif les conjoints de moins de 21 ans et en imposant au demandeur un niveau « élémentaire » en français.

Également réintégré, l’allongement à cinq ans de la durée de résidence nécessaire aux étrangers qui ne travaillent pas pour bénéficier de l’allocation personnalisée d’autonomie et des prestations familiales. Néanmoins, les centristes n’évoquent pas l’aide personnelle au logement (APL), qui avait beaucoup fait parler en décembre.

Le « délit de séjour irrégulier », puni d’une amende, est également proposé dans leur texte, tout comme l’impossibilité pour les étrangers en situation irrégulière de bénéficier de réductions tarifaires dans les transports franciliens.

Les centristes ont aussi réécrit, pour la rendre constitutionnelle, une disposition censurée sur le fond par les « Sages » sur le relevé des empreintes digitales et la prise de photographie d’un étranger sans son consentement. Il s’agissait là de la seule mesure initialement prévue par le gouvernement qui avait été censurée.

Caution étudiante et AME pas évoquées

Très débattue, la caution demandée aux étudiants étrangers en France pour prévoir leur retour n’est pas intégrée au texte, mais ceux-ci devront néanmoins « justifier annuellement » du caractère « réel et sérieux » de leurs études.

Les centristes n’ont pas repris non plus la fin de l’automaticité du droit du sol pour les enfants d’étrangers nés en France, ni l’instauration par le Parlement de « quotas » migratoires annuels, mesures qui avaient été censurées par le Conseil constitutionnel au titre du principe de séparation des pouvoirs.

Quant à l’Aide médicale d’État (AME), un dispositif permettant aux étrangers en situation irrégulière de bénéficier d’un accès aux soins et que le nouveau Premier ministre Gabriel Attal a prévu de réformer « par voie réglementaire », elle ne figure pas non plus dans le texte.

L’agenda du Sénat offre de multiples occasions au groupe centriste de faire inscrire son texte à l’ordre du jour, même s’il devra satisfaire un délai constitutionnel de six semaines entre le dépôt du texte et son examen en séance publique. Son adoption à la chambre haute ne ferait alors aucun doute, le Sénat étant très majoritairement dominé par une alliance LR-centristes.

« L’immigration n’est pas un droit » écrivent, dans une tribune publiée sur L’Express, les sénateurs Hervé Marseille et Philippe Bonnecarrère, appelant le gouvernement à « faire preuve d’esprit de responsabilité en inscrivant l’examen de notre texte au plus vite dans le calendrier parlementaire. »

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