L'indépendance de la justice menacée en Pologne, disent les experts européens

Le Parlement polonais. En ce qui concerne deux projets de loi actuellement débattus au Parlement polonais et de récents amendements apportés aux pouvoirs du ministre de la justice, les juristes européens estiment que leur "effet cumulatif fait peser une menace sérieuse sur l’indépendance de la justice". /Photo d'archives/REUTERS/Kacper Pempel

STRASBOURG (Reuters) - Les nouveaux projets de réforme judiciaire en Pologne constituent une menace sérieuse pour l’indépendance de l’appareil judiciaire, estime la Commission de Venise, un organe du Conseil de l’Europe, dans un avis rendu vendredi.

L’analyse de la Commission européenne pour la démocratie par le droit, nom officiel de ce cénacle d’experts en droit constitutionnel, était notamment attendue par la Commission européenne qui a ouvert une procédure d’infraction contre Varsovie, en juillet, en réaction aux réformes judiciaires en cours et déjà adoptées.

En ce qui concerne deux projets de loi actuellement débattus au Parlement polonais et de récents amendements apportés aux pouvoirs du ministre de la justice, les juristes européens estiment que leur "effet cumulatif fait peser une menace sérieuse sur l’indépendance de la justice".

La Commission de Venise porte un regard négatif sur la réforme du Conseil national de la magistrature, une instance qui participe au processus de nomination des magistrats, dont les membres seraient élus par le Parlement, au risque d’une "politisation de cet organe".

Elle critique le projet de création au sein de la Cour suprême de deux nouvelles chambres, composées de nouveaux magistrats peu expérimentés, qui disposeraient de pouvoirs spéciaux les plaçant au-dessus des autres formations de la Cour.

Quant au pouvoir donné au ministère de la Justice de démettre un président de cour, il devrait, selon les constitutionnalistes, être soumis à l’approbation du Conseil national de la magistrature ou de l’assemblée générale des juges de la juridiction concernée.

La Commission de Venise critique encore sévèrement la fusion entre la fonction de procureur général et celle de ministre de la Justice, effective depuis 2016.

"Si la fusion des deux postes devait être maintenue, alors la capacité du procureur général à intervenir dans les affaires individuelles devrait être supprimée et ses compétences limitées à l’élaboration de directives générales pour les parquets, si l’on veut prévenir tout risque de manipulation politique", affirme-t-elle.

(Gilbert Reilhac, édité par Yves Clarisse)