Visite surprise de l'ex-Premier ministre Saad Hariri au Liban

L'ancien Premier ministre libanais Saad Hariri (au centre) est arrivé vendredi au Liban pour sa première visite dans le pays depuis trois ans. /Photo prise le 8 août 2014/REUTERS/Georges Farah

par Tom Perry et Oliver Holmes BEYROUTH (Reuters) - L'ancien Premier ministre libanais Saad Hariri s'est rendu vendredi au Liban pour la première fois depuis trois ans, un déplacement interprété comme une affirmation de son leadership sur la communauté sunnite après une incursion d'islamistes radicaux dans le nord-est du pays le week-end dernier. Saad Hariri, considéré comme la figure politique la plus influente du sunnisme au Liban, a choisi de vivre en exil depuis 2011. Il a quitté Beyrouth après le renversement du gouvernement par une coalition emmenée par le Hezbollah chiite soutenu par l'Iran et depuis, partage son temps entre la France et l'Arabie saoudite. "Je reviens à Beyrouth aujourd'hui après une absence de trois ans et quatre mois. Cela a été la plus sévère punition de ma vie et mon retour est la plus importante des récompenses", a-t-il commenté. Saad Hariri, dont la visite n'avait pas été annoncée, est arrivé au siège du gouvernement dans la capitale libanaise, où il a rencontré le Premier ministre Tammam Salam. Hariri a annoncé cette semaine que l'Arabie saoudite ferait un don d'un milliard de dollars à l'armée libanaise pour l'aider à lutter contre les extrémistes. "Mon retour intervient après le don saoudien qui nécessite de voir comment il peut être mis en oeuvre et traduit en soutien à l'armée", a déclaré l'ex-chef du gouvernement sur son compte Twitter. Plusieurs hommes politiques et responsables publics ont émis l'espoir que ce retour puisse aider à stabiliser la situation au Liban pris dans les violences confessionnelles et dans une impasse politique. Walid Jumblatt, leader influent de la communauté druze, a jugé ce retour "très positif". "Pour faire face aux extrémistes, sa présence est très importante", a-t-il dit. Pour le commentateur politique, Michael Young, "un vide s'est créé dans la communauté sunnite" depuis le départ d'Hariri. "Cela devient de plus en plus dangereux parce que cette communauté devient de plus en plus radicale", a-t-il dit. "Le retour d'Hariri est probablement une tentative de réaffirmer avec l'aide des Saoudiens un certain contrôle sur la communauté sunnite". CONTEXTE TENDU Hariri a rencontré vendredi le ministre de l'Intérieur Nohad Machnouk et l'ambassadeur américain David Hale. Les témoignages de soutien sont venus de plusieurs personnalités de premier plan comme le patriarche maronite Bechara al Rai ou le président chiite du parlement Nabih Berri. Ce retour s'effectue dans un contexte de tension intérieure, notamment après la prise de la ville frontalière d'Ersal par des hommes armés le week-end dernier et alors que la guerre civile syrienne menace toujours de contaminer le Liban. Certains qui étaient membres de l'Etat islamique (EI)se sont retirés de la ville mercredi après cinq jours de combats avec l'armée libanaise. Dans un entretien au journal al Hayat basé à Londres, Saad Hariri avait déclaré : "ni l'Etat, ni nous, ne resterons à ne rien faire face aux conspirations de ces groupes." Hariri a aussi annoncé son intention de se rendre sur la tombe de son père, Rafik Hariri, assassiné en 2005 à Beyrouth alors qu'il était Premier ministre. Ce décès avait contraint Saad Hariri à entrer en politique. Saad Hariri accuse le président syrien Bachar al Assad d'être derrière l'attentat à la bombe qui a coûté la vie à son père. Quatre membres du Hezbollah sont jugés par contumace par un tribunal spécial aux Pays-Bas pour ce meurtre. Le Hezbollah, dont les forces combattent aux côtés des forces de Bachar al Assad dans la guerre civile en Syrie, nie toute implication. (Tom Perry et Oliver Holmes avec Alexander Dziadosz; Danielle Rouquié pour le service français)