L'Espagne va sauver de la faillite neuf autoroutes à péage
par Sonya Dowsett et Jose Elías Rodríguez
MADRID (Reuters) - Le gouvernement espagnol est sur le point de conclure un accord avec les grands noms de la banque et du BTP du pays en vue de sauver de la faillite neuf tronçons d'autoroute à péage, qui passera notamment par la reprise de quatre milliards d'euros de dettes, ont dit quatre sources proches des discussions.
Les automobilistes ont largement préféré emprunter les routes gratuites pendant la récession de plus de deux ans dont l'Espagne vient tout juste de sortir, provoquant une chute de 40% du trafic sur les autoroutes à péages.
Madrid entend mettre sur pied une entité publique qui reprendra à son compte la dette, comme un prêt à long terme et à faible taux d'intérêt, ont précisé les sources.
Les groupes de BTP recevront 20% des actions de cette nouvelle entité, ce qui se traduira par une dépréciation de 1,7 milliard d'euros sur les investissements.
Ces groupes, parmi lesquels Ferrovial, Abertis, OHL, ACS, FCC et Acciona, avaient créé des coentreprises pour décrocher des concessions octroyées pendant le gouvernement pendant le boom de la construction qui a porté l'économie espagnole au cours de la décennie précédente.
Pour ce faire, les entreprises de BTP avaient emprunté de l'argent auprès des principales banques du pays, Santander, Caixabank, Bankia, Popular et BBVA.
Le dispositif retenu permet d'éviter que l'endettement des autoroutes à péage ne soit inclus dans le calcul des déficits de l'Espagne, à un moment où le pays s'efforce de respecter les objectifs en la matière convenus avec l'Union européenne.
ENDETTEMENT ESPAGNOL
"Toutes les parties concernées essaient de trouver une solution. L'alternative serait une faillite des autoroutes à péage et un gouvernement qui se retrouveront soudainement avec un déficit alourdi quatre milliards", a dit l'une des sources déjà citées.
Ceci étant dit, la transformation de la dette des autoroutes à péage en prêt fera gonfler l'endettement de l'Espagne, déjà annoncé pour l'année prochaine à près de 100% du produit intérieur brut (PIB), son niveau le plus élevé en plus d'un siècle.
Il y a cinq ans, ce ratio dette sur PIB n'était que de 40%.
"Les trois parties impliquées sont perdantes, la question est de savoir qui perd le plus (...)", a déclaré Mikel Echavarren, à la tête du consultant immobilier Irea.
Ce ne serait pas la première fois que l'Espagne, qui va sortir du programme d'aide international qui avait été octroyé son secteur bancaire, intervient pour adoucir les conséquences de l'effondrement du boom immobilier intervenu il y a cinq ans.
L'année dernière, Madrid avait mis en place une structure de défaisance ("bad bank"), qui a repris avec une décote 200.000 actifs immobiliers - d'une valeur totale de 50,5 milliards d'euros - aux banques nationalisées et à celles ayant bénéficié d'un plan de sauvetage de l'Etat espagnol.
La mise en place de cette structure avait été l'une des conditions posée par l'Union européenne et le Fonds monétaire international (FMI) à l'octroi d'une aide au secteur bancaire espagnol.
Madrid devra solliciter le feu vert des autorités européennes pour la création de l'entité reprenant la dette des autoroutes à péage, dont le capital devrait être de l'ordre de 600 millions d'euros.
La plupart des entreprises concernées par l'effondrement de l'activité des autoroutes à péage ont vraisemblablement déjà passé des dépréciations sur leurs investissements dans ces entreprises.
Benoit Van Overstraeten pour le service français, édité par Nicolas Delame