Les USA autorisent huit pays à acheter du pétrole iranien

WASHINGTON (Reuters) - Les Etats-Unis ont annoncé vendredi qu'ils exempteraient temporairement huit pays de sanctions relatives à l'Iran, ce qui leur permettra de continuer à importer du pétrole iranien en dépit de la mise en oeuvre dès lundi des sanctions américaines à l'encontre du régime de Téhéran.

Le secrétaire d'Etat Mike Pompeo, qui a annoncé cette décision lors d'une conférence téléphonique, n'a pas précisé le nom des entités concernées mais il a indiqué que l'Union européenne dans son ensemble ne recevrait pas d'exemption.

Le ministre turc de l'Energie Fatih Donmez a fait savoir que son pays avait eu l'assurance qu'il obtiendrait une exemption.

L'Inde, l'Irak et la Corée du Sud figurent aussi sur la liste, a dit une source proche du dossier. Selon la législation américaine, ce type de dérogation ne peut être accordé que pour 180 jours au maximum.

L'Irak a confirmé vendredi avoir été informé qu'il serait autorisé à continuer à importer du gaz, d'autres sources d'énergie, ainsi que des produits alimentaires d'Iran, à condition de ne pas payer les importations en dollars.

Les cours du pétrole ont perdu du terrain vendredi, accusant une perte de six% sur la semaine, dans la crainte d'un excédent d'offre sur le marché mondial après ces annonces de dérogations.

Le contrat décembre sur le brut léger américain (West Texas Intermediate, WTI) perdait 1,3% à 63,14 dollars le baril.

De son côté, le secrétaire au Trésor Steve Mnuchin a déclaré que les Etats-Unis avaient clairement indiqué au service de messagerie financière SWIFT, basé à Bruxelles, qu'ils s'attendaient à ce que toutes les institutions financières iraniennes qui seront mises lundi sur liste noire soient déconnectées. Il n'a pas précisé le nom des établissements ciblés.

Le retour des sanctions américaines contre l'Iran est destiné à mettre la pression sur le pays pour qu'il modifie son programme nucléaire militaire et civil et qu'il cesse son soutien aux forces armées au Yémen, en Syrie, au Liban et dans d'autres régions du Moyen Orient.

"Cette partie du processus doit permettre de priver le régime des revenus qu'il utilise pour propager la mort et la destruction autour du monde", a déclaré Mike Pompeo. "Notre objectif ultime est d'obliger l'Iran à abandonner de façon permanente ses activités irrégulières étayées et à agir comme un pays normal".

OBJECTIF ZÉRO PÉTROLE IRANIEN

Il a ajouté que Washington accorderait des dérogations temporaires aux huit importateurs de pétrole iranien uniquement parce qu'ils ont fait preuve de baisses sensibles de leurs importations de pétrole brut et de coopération sur de nombreux autres fronts.

Il a dit par la suite que l'objectif ultime de Washington était d'arrêter toutes les exportations de pétrole brut iranien.

"Finalement, nous irons vers zéro pétrole brut iranien. Cela nous prendra un certain nombre de mois", a dit Mike Pompeo selon le texte d'un entretien accordé à Fox News et publié par le département d'Etat. "Nous avons été capable de le faire d'une façon qui n'a pas eu un impact énorme sur les cours du pétrole. C'est une bonne chose pour les consommateurs américains."

L'Iran a déclaré vendredi qu'il n'était pas inquiet de la mise en oeuvre des sanctions américaines sur ses secteurs pétrolier et financier.

"Nous avons la connaissance et la capacité pour gérer les affaires économiques du pays", a déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Bahram Qasemi, à la télévision publique.

"La probabilité pour que les Etats-Unis atteignent leurs objectifs économiques à travers ces sanctions est très faible et il est certain qu'il n'est pas possible qu'ils atteignent leurs objectifs politiques avec de telles sanctions", a-t-il ajouté.

"Les nouvelles sanctions américaines auront surtout un effet psychologique", a dit Bahram Qasemi.

Mais la population iranienne redoute l'impact des sanctions, que ce soit pour les entreprises qui peineront à se fournir en matières premières ou pour les malades et les personnes âgées qui n'auront plus les moyens de s'acheter des médicaments.

L'Union européenne, la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni ont réaffirmé de leur côté dans une déclaration conjointe leur détermination à poursuivre la mise en oeuvre de l'accord sur le nucléaire iranien et protéger les acteurs économiques européens après la décision de Washington de rétablir les sanctions contre Téhéran. Ils ont souligné "regretter vivement" le rétablissement de ces sanctions à compter du 5 novembre.

Les Etats-Unis pensent que l'offre mondiale de pétrole brut dépassera la demande l'an prochain, ce qui permettra plus facilement aux pays concernés de ramener leurs importations de pétrole iranien à zéro, a dit le représentant spécial des Etats-Unis pour l'Iran, Brian Hook, à la presse.

(Arshad Mohammed, Lesley Wroughton et Patricia Zengerle, Blandine Hénault et Juliette Rouillon pour le service français)