Les Houthis vont mettre en place un gouvernement au Yemen

DUBAI (Reuters) - Les Houthis, principale communauté chiite du Yemen, et le parti de l'ancien président Ali Abdallah Saleh ont annoncé jeudi leur intention de mettre sur pied un conseil gouvernemental pour diriger le pays, signe de leur impatience face au peu d'avancées d'un processus de paix piloté par les Nations Unies à Koweït. Des responsables du gouvernement du président Abd-Rabbou Mansour Hadi ont estimé que cette initiative sapait les efforts diplomatiques pour mettre fin à une violente guerre civile, qui a notamment entraîné une entrée dans le conflit d'une coalition emmenée par l'Arabie saoudite et provoqué une crise humanitaire. "La déclaration des Houthis et de Saleh faite aujourd'hui est un message adressé au monde disant qu'ils ne sont prêts ni à faire la paix ni à épargner au Yemen de nouvelles destructions", a déclaré Abdel Aziz al Djoubari, vice-Premier ministre du président Hadi, à la chaîne de télévision al Hadath, basée à Dubai. L'annonce des Houthis, qui bénéficient du soutien de l'Iran, et du Congrès général du peuple, le parti d'Ali Abadallah Saleh, pourrait remettre en péril un fragile cessez-le-feu entré en vigueur en avril, entraînant une certaine réduction de l'intensité du conflit. Vers la mi-juillet, à en croire des délégués, les négociations parrainées par les Nations unies visant à mettre un terme à près de 16 mois de conflit au Yémen semblaient avoir repris au Koweït, malgré les menaces des représentants du gouvernement yéménite soutenu par l'Arabie saoudite de ne pas y participer. Depuis le cessez-le-feu du mois d'avril, instauré au début de ces négociations, des affrontements se sont toutefois poursuivis dans plusieurs zones du pays où les islamistes ont tiré parti du vide en matière de sécurité pour commettre une série d'attentats. Les négociations au Koweït réunissent les Houthis et le gouvernement reconnu par la communauté internationale. Peu de progrès ont été enregistrés en plus de deux mois de discussions. Selon un communiqué publié par l'agence de presse des Houthis, sabanews.net, le nouvel conseil gouvernemental fonctionnera sur le principe d'une direction tournante, avec un président et un vice-président de chacun des alliés participant à cette instance. L'accord annonçant la mise en place d'une telle structure évoque, selon sabanews.net, l'incapacité de la communauté internationale à "contenir l'arrogance de l'Arabie saoudite" comme un facteur important ayant pesé dans la décision de délaisser les négociations de paix. Les Houthis se sont emparés de Sanaa en septembre 2014 et ont étendu par la suite leur emprise vers le sud et Aden, précipitant le départ en exil du gouvernement du président Hadi avant l'intervention, en mars 2015, d'une coalition constituée par l'Arabie saoudite et ses alliés du Golfe. Les forces houthis associés aux fidèles d'Ali Abadallah Saleh détiennent aujourd'hui l'essentiel de la partie Nord du pays tandis que les forces du président Abd-Rabbou Mansour Hadi, alliées à des séparatistes du sud et plusieurs tribus, en contrôlent le reste. Le conflit a déjà fait plus de 6.400 victimes, des civils pour près de la moitié, et entraîné le déplacement de plus de 2,5 millions de personnes. (Mohammad Ghobari, avec la contribution d'Ahmed Tolba au Caire, Benoît Van Overstraeten pour le service français)