Les combats se poursuivent dans le centre d'Aden, au Yémen

L'AVANCÉE HOUTHIE À ADEN

par Mohammed Mukhashaf ADEN (Reuters) - Les combattants chiites houthis affrontaient mercredi des milices locales favorables au président Abd-Rabbou Mansour Hadi dans le centre historique d'Aden, alors qu'arrivaient les premières livraisons d'aide internationale dans le port du sud du Yémen. Selon des habitants, une dizaine de cadavres jonchent les rues et plusieurs bâtiments ont été incendiés ou démolis par des tirs de missiles. Des appels au djihad contre les combattants chiites ont été lancés depuis les mosquées de la ville. Des habitants du quartier du Cratère ont déclaré qu'une nouvelle offensive des Houthis, appuyés par des chars et des véhicules blindés, avait été au moins partiellement repoussée en milieu d'après-midi et que les assaillants avaient été chassés de certaines zones du nord de la ville. Depuis trois semaines, les milices chiites tentent de s'emparer d'Aden, en dépit de la campagne de frappes aériennes lancée le 26 mars dernier par la coalition conduite par l'Arabie saoudite. Elles ont atteint le centre historique de la ville au début du mois, mais les lignes de front fluctuent depuis. Les combats ont dévasté certains quartier d'Aden, dont ceux du centre où l'électricité et l'eau sont coupées, et les hôpitaux peinent à absorber le nombre de blessés. "On approche de la catastrophe", a déclaré Marie-Claire Feghali, porte-parole du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) au Yémen. "Les magasins sont fermés, si bien que les habitants ne peuvent se procurer de la nourriture ou de l'eau. Il y a des cadavres dans les rues. Les hôpitaux sont débordés." L'ONG Médecins sans frontières a annoncé mercredi qu'un bateau transportant de l'aide médicale d'urgence avait accosté à Aden, une première depuis la campagne de frappes aériennes de la coalition. Le CICR a de son côté annoncé l'arrivée mercredi, par bateau également, d'une équipe de chirurgie. INGÉRENCE IRANIENNE Selon l'Organisation mondiale de la Santé, au moins 643 personnes ont été tuées au cours du conflit et plus de 2.200 ont été blessées, tandis que des dizaines de milliers de familles ont été contraintes de se déplacer en raison des combats au sol et des frappes aériennes. En prenant la tête d'une coalition visant les combattants houthis, qui ont chassé le président Hadi du pouvoir après s'être emparée de Sanaa, la capitale du pays, en septembre, l'Arabie saoudite a transformé le Yémen en champ de bataille régional où s'affrontent à distance les puissances chiites et sunnites, comme en Syrie, au Liban ou en Irak. Téhéran a appelé à la cessation immédiate des frappes aériennes de la coalition. En déplacement au Pakistan, qui débat ces jours-ci d'une demande saoudienne d'envoi de moyens militaires, le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, a appelé à une solution politique à la crise passant par un dialogue élargi. "Le peuple yéménite, a-t-il insisté, n'aurait pas dû être soumis à des bombardements aériens." Téhéran va dépêcher le destroyer Alborz et le navire de soutien Bouchehr qui patrouilleront dans le golfe d'Oman et dans la mer Rouge, officiellement afin de protéger la marine marchande iranienne de menace des pirates, a annoncé le contre-amiral Habibollah Sayyari. Les Emirats arabes unis ont dénoncé mercredi les ingérences de la République islamique qu'ils ont accusée de chercher depuis des années à exporter systématiquement sa révolution au Moyen-Orient. Le ministre des Affaires étrangères d'Oman, le seul pays du Conseil de coopération du Golfe Arabique à ne pas avoir rejoint la coalition, a appelé mercredi à une trêve humanitaire après avoir rencontré son homologue iranien à Mascate. (Nicolas Delame pour le service français)