Lens: de la Ligue 2 à la Ligue des champions en trois ans, l'incroyable progression des Sang et Or
Les Sang et Or n’iront pas jusqu’à la remercier, cela ferait mauvais genre, et surtout, cela ne correspond pas à leurs valeurs, mais force est de reconnaître qu’elle aura compté pour la suite, d’une certaine façon. L’apparition brutale du Covid-19 en 2020 a stoppé le cours normal de nos vies, et ce plusieurs mois durant, entraînant par la même occasion l’interruption définitive des championnats de football, lorsque le premier confinement a été décrété.
Le 9 mars 2020, quand il inscrit ce penalty qui offre la victoire et la deuxième place de Ligue 2 aux Sang et Or, Florian Sotoca ne mesure pas complètement la portée de son but. L’attaquant est encore loin de se douter qu’il offrira la montée en Ligue 1 à son équipe, après cinq années de galères, de tâtonnements, de doutes, de désillusions, de faillites.
L’actionnaire principal et président du Racing Club de Lens depuis 2018, Joseph Oughourlian, a remis le club sur les rails, mais la montée en Ligue 1 était indispensable pour assurer l’autonomie et la pérennité financière d’un club de cette dimension, les ressources étant plus importantes à l’étage supérieur.
La première étape de cette ascension vers les sommets prend fin le 30 avril 2020, quand la LFP a entériné la montée de Lens. La ferveur de Bollaert est de retour dans l’élite, qui voit débarquer un jeune technicien nommé Franck Haise, passé de coach de la réserve à celui de l’équipe première en février 2020, après le limogeage de Philippe Montanier. Inconnu de l’élite, Franck Haise va vite apprendre à se faire connaître.
Cohérence et stabilité
Aux côtés de Florent Ghisolfi, l’ancien directeur sportif (parti depuis chez Ineos), l’entraîneur artésien s’est toujours attaché à bâtir un effectif cohérent, que la gouvernance sportive du RC Lens a enrichi chaque année depuis 2021. "La clé, c’est la stabilité, du projet et de ce qu’on est en train de mettre en place depuis 2017", confiait le directeur général du club Arnaud Pouille, en novembre 2022.
Le recrutement ciblé, intelligemment pensé, a permis à Lens de repérer le latéral Przemyslaw Frankowski aux Etats-Unis, de donner sa chance à Jonathan Clauss, alors en D2 allemande, à l’Arminia Bielefeld. Mais aussi d'attirer le Belge Loïs Openda, auteur de 19 buts cette saison, ou encore le capitaine Seko Fofana, un temps courtisé par le PSG en raison de ses incroyables performances réalisées lors de la saison 2021-2022. Tous sont arrivés ces trois dernières années, jouant un rôle majeur dans l’épopée lensoise.
L’identité de cette équipe s’est forgée autour de deux aspects chers à Franck Haise: la cohésion et la générosité. "C’est une équipe qui dégage beaucoup de force, de cohésion et d’enthousiasme", était bien obligé de reconnaître Christophe Galtier début janvier, après la défaite du PSG (1-3) à Bollaert. Invincibles en Ligue 1 jusque-là, les Parisiens étaient tombés sur une formidable équipe lensoise.
Il aura pourtant fallu des ressources considérables au club pour digérer les bouleversements opérés à l’automne avec les départs successifs de nombreux cadres, de Florent Ghisolfi à Laurent Bessière, l’ancien directeur de la performance. Mais cela ne s’est jamais ressenti sur les résultats. "Il faut féliciter aussi les dirigeants qui font un travail remarquable. Ils font un travail de l’ombre. On pense souvent à des victoires contre Marseille ou Monaco, mais il ne faut pas oublier que lors de la trêve et du remue-ménage né des départs de personnes importantes, ces mecs-là ont pris des décisions fortes pour rassurer tout le monde", soulignait Jean-Louis Leca après la très importante victoire contre l’OM, le 6 mai dernier.
Un précieux succès qui s’inscrivait dans la lignée des récentes performances d’un club qui aura su se remettre d’aplomb après un mois de février plus compliqué, s’appuyant sur la force de son groupe, et les liens forts qui unissent les joueurs au sein de cette équipe, pour repartir de l’avant. "L’ambition naît dans un vestiaire", estimait Arnaud Pouille en fin d’année dernière. Celle du RC Lens n’a plus de limites.
Si le titre paraît hors d’atteinte désormais, la Ligue des champions est à portée de main et semble ne plus pouvoir échapper à des Lensois qui ne l’ont plus disputé depuis la saison 2002-2003. Un sacré tour de force pour le discret président lensois Joseph Oughourlian, qui se penchera peut-être samedi prochain sur cette interview accordée à la Voix du Nord en 2019, et ses paroles prophétiques: "Mon rêve secret, c’est de ramener l’Europe à Bollaert." Il est en passe de le réaliser.