Laura Rapp, rescapée de violences conjugales : "J’ai failli perdre la vie sous les yeux de ma fille"

Viols, agressions, deuils insurmontables, accidents de la vie : dans "Trauma", anonymes et célébrités reviennent pour Yahoo sur un traumatisme qui a bouleversé leur vie.

Le 16 avril 2018, Laura Rapp est victime d'une tentative de meurtre par son ex-conjoint, un cauchemar qu’elle vit sous les yeux de sa fille de deux ans et demi. Pour Yahoo, la jeune femme a accepté de se livrer sur sa lente descente aux enfers, revenant notamment sur cette nuit d’horreur. Un témoignage poignant.

Elle a survécu aux coups de son conjoint mais n’en reste pas moins traumatisée. Laura Rapp fait partie des nombreuses victimes de violences conjugales. Pendant cinq ans, la jeune mère de famille n’a cessé d’endurer les pressions psychologiques, les insultes, les agressions physiques et les menaces de mort de son ancien compagnon. Un enfer qu’elle a vécu, en partie, aux côtés de sa fille, Alice. Un parcours chaotique qui a notamment inspiré un téléfilm "Elle m’a sauvée", diffusé ce mardi soir sur 6ter. Pour Yahoo, elle est revenue sur son histoire, racontant la manière dont elle est passée d’une idylle à un véritable cauchemar. (Retrouvez l’intégralité de l’interview en fin d’article)

C’était le 16 avril 2018. Ce soir-là, Laura est victime d’une tentative de meurtre par son ex-conjoint dans leur propre appartement. Une dispute éclate, les insultes fusent et les gestes violents s'en suivent. Ne souhaitant pas envenimer la situation, la jeune femme décide alors de ne plus parler et de se retirer dans sa chambre. Seulement voilà : à son grand désarroi, tout empire. "Il est arrivé en courant, m’a soulevée et là, je me suis écrasée sur la table de chevet", se remémore-t-elle, non sans émotion. Pris d’une colère noire, il l’étrangle à plusieurs reprises, lui affirmant son intention de la tuer. "J’ai cru mourir sous les yeux de ma fille", explique-t-elle.

Elle perd une première fois connaissance avant de se réveiller et de lui arracher la petite des bras. Elle la repose dans son lit et subit, une deuxième fois, la folie de son compagnon. "J’ai compris qu’il fallait que je sorte de l’appartement car je n’avais aucune chance de m’en sortir. Il était déterminé à me tuer." Elle se débat violemment et finit par le faire tomber. Elle profite de cette "accalmie" pour courir jusqu’à la porte d’entrée. Mais là encore, le sort s’acharne contre elle. La porte est fermée à clef. Elle décide donc de sauter par la fenêtre pour s’échapper des griffes de son agresseur mais elle n’y parvient pas. "Il m’a prise, m’a éclaté la tête à plusieurs reprises sur le mur, c’est la seule chose dont je me souviens", explique-t-elle tout en précisant devoir la vie à ses voisins. "Ils ont frappé à la porte, c’est ce qui l’a poussé à arrêter la strangulation."

"Je ne suis qu’une merde, je ne suis peut-être rien sans lui"

Comme elle le rappelle, cette nuit-là n’a été que la continuité des cinq années écoulées, une période pendant laquelle elle a subi des humiliations permanentes, notamment sur son apparence physique. "Tu es grosse, dégueulasse, personne ne voudra de toi", lui aurait-il dit à de nombreuses reprises. Des attaques qui lui font perdre totalement confiance en elle. Face à ce déversement de haine, Laura finit par se poser des questions et à perdre totalement raison. "Je ne suis peut-être qu’une merde, je ne suis peut-être rien sans lui", finit-elle par se demander.

Malgré tout, elle reste avec lui. Et ce, même après avoir subi la violence physique de son compagnon. Au bout de six mois de relation, il la gifle pour la toute première fois, une erreur qu’il met sur le dos de son enfance. Elle le quitte une première fois avant de le retrouver plusieurs mois plus tard. "Il est revenu vers moi, m’a sorti le grand jeu en me disant à quel point il était désolé." Rapidement, elle tombe enceinte et finit par subir, à nouveau, les coups de son conjoint quelques mois plus tard. "Je ne pensais pas que c’était possible de frapper une femme enceinte", confie-t-elle tout en expliquant la raison pour laquelle elle n’avait pas encore porté plainte. "Je n’avais pas confiance en la justice. Il présentait bien, était intelligent et je savais qu’il n’aurait pas grand-chose."

"J’ai peur qu’il passe à l’acte sur moi et ma fille pour se venger"

Finalement, après la nuit d’horreur du 16 avril 2018, il finit par être condamné à huit ans de prison ferme pour tentative de meurtre et cinq ans de suivi socio-judiciaire. Un procès dont elle se rappellera toute sa vie. "Ça a été l’horreur, d’une violence inouïe", se rappelle-t-elle expliquant avoir failli s’évanouir à un certain moment. "On était sur quelque chose d’inhumain".

Aujourd’hui, cinq ans après les faits, Laura ne regrette pas d’avoir finalement déposé plainte et de s’être battue pour sa fille. "Tous les parents devraient se battre pour leur enfant. Pour ma fille, je donnerai ma vie", confie-t-elle expliquant toutefois vivre de sombres périodes. "Pour moi, c’est très dur car je suis encore en procédure judiciaire avec lui." Comme elle le rappelle, son ex-conjoint a été libéré il y a un mois et demi, faisant ressurgir certaines angoisses. "En prison, il me harcelait, il avait retrouvé mon adresse, me forçant à déménager deux fois", raconte-t-elle tout en expliquant son incompréhension totale à sa "semi-liberté". Car aujourd’hui, Laura vit encore dans la peur. "Malgré une condamnation pour tentative de meurtre et le retrait de l’autorité parentale, j’ai encore peur de cet homme. J’ai dû partir très loin pour nous protéger, ma fille et moi, et je crains de le croiser à nouveau. J’ai peur qu’il passe à l'acte pour se venger."

"J’ai vu la mort dans ses yeux. Ma fille hurlait"

Un enfer qu’elle ne souhaite surtout pas faire revivre à sa fille. À l’époque des faits, elle avait seulement deux ans et demi. "J'ai vu la mort dans ses yeux. Elle hurlait, était en état de choc", se rappelle-t-elle précisant qu’elle ne cessait de pousser des hurlements pendant des mois. "Elle n’a pas été touchée physiquement le soir du drame mais a été autant impactée que moi", explique-t-elle, à tel point qu’elle a eu un retard de langage assez important. Alors, afin qu’elle puisse évoluer avec le moins de séquelles possibles, elle a été suivie par un pédopsychiatre et par une victimologue.

En parallèle, Laura a fait le nécessaire pour changer le nom de famille de sa fille, changement qu’elle a pu obtenir auprès du ministère de la Justice. Et sa plus belle récompense, c’est de la voir aujourd’hui sourire. Pour autant, sa fille a toujours des stigmates des événements passés. "C’est une enfant très sensible, elle a toujours besoin de savoir ce que je fais et où je suis", confie-t-elle tout en donnant des nouvelles rassurantes. "Aujourd’hui, elle va mieux. Je ne veux pas que l’on pense qu’un enfant est foutu même s’il a vécu le pire."

"Ma fille préfère se dire que son père est mort"

Aujourd’hui, elle va mieux et n’a jamais réclamé une seule fois son père depuis la nuit du drame. Selon les derniers comptes rendus d’évaluation, elle le considère comme mort, un moyen pour elle de se protéger et de ne plus souffrir. "Ça a été un peu violent d’entendre ça, j’aurais préféré qu’elle ait un père normal", conclut-elle.

Regardez en intégralité l'interview de Laura Rapp